266è jour : Quelque part en mer - Bari - Gioia Del Colle

3 janvier 2012

44,1 km, 10822 km au total

On avait tout prévu, optimisé tant qu'on pouvait. La lumière puissante des lampes du couloir ne nous ont pas tellement dérangé grâce aux loups. Le roulis de la mer était tout à fait supportable, la température ok, le passage près de nous quasi inexistant... mais malgré les bouchons nous n'avons pas résisté à "l'italien", vous savez celui du cliché, celui qui n'a probablement jamais appris dans son enfance que l'être humain avait la capacité de chuchoter. Bon ben on en a eu une petite volée qui à n'importe quelle heure de la nuit n'ont eu absolument aucun scrupule à s'époumoner et tutti quanti ! Ils sont probablement de la même famille que ceux qui fumaient devant le panneau d'interdiction et qui se servaient d'un écran de jeu électronique (type ipad grand format à plat) comme table et cendrier. Bon il faut de tout pour faire un monde et ne croyez pas qu'on généralise à l'échelle d'un pays, surtout quand on n'a pas encore posé un pied dans ledit pays :-) Notre asiatique est toujours là, lui n'a pas fait un bruit plus élevé que le bruit de la fermeture éclair de son sac à dos.
Enfin bref la nuit a été difficile.
On se lèvre vers 7h30, une heure avant l'arrivée pour avoir le temps de plier tranquillement et de prendre un petit dej. A 8h30 un petit coups d'œil sur le GPS nous confirme qu'on n'est pas vraiment arrivés. On est loin de la côte et nos 35-40 km/h vont probablement nous amener à une très grosse heure de retard. Aucune idée de pourquoi ni aucune explication. On apprendra plus tard que c'est "normal". On débarque notre vélo avec finalement quasiment 2 heures de retard. Il est 10h30 !
On checke nos emails et découvre qu'on n'a pas de nouvelles d'une potentielle personne qui aurait pu nous héberger à Bari. On s'oriente donc vers notre plan B qui est un Bed & Breakfast à Gioia Del Colle... à 42 km au sud. Seul souci, si désormais on veut être là ce soir il ne va pas falloir trainer étant donné l'heure.
On traverse donc la jolie ville de Bari un peu rapidement, pas d'arrêt photo mais on découvre quand même pas mal de superbes bâtiments, château ou forteresse, ... le tout avec les palmiers et le soleil radieux, c'est très agréable.
On fait d'ailleurs une petite pause déshabillage en règle : Hélène roule jambes nues et moi en t-shirt. J'en profite également pour descendre un peu ma selle. Ma douleur au genou gauche provient peut-être de là (lectures récentes sur le net) et ça commence à ne plus trop être de l'ordre de l'anecdotique donc il faut prendre des mesures...
On sort de la ville plein sud et on croise un autre cyclotouriste. On s'arrête et on entame la conversation (petite pensée pour les mamies à chienchien qui s'arrêtent discuter avec les autres propriétaires de toutous). Fred est suisse, mais la partie qui cause français :-) Il est parti depuis juillet, tout seul, et arpente les routes d'Europe du sud-est. Son itinéraire est très rigolo, vraiment plus guidé par ses envies que par toute logique d'optimisation. On aime bien l'idée. Il n'est pas pressé, a fait des boucles imprévues pour trainer un peu avant d'entamer la sortie de l'Europe, comme nos cyclorêveurs couchés rencontrés à Xanthi il prévoit d'aller au Japon. Dans un premier temps Istanbul, puis probablement Ankara (-5°C la nuit prochaine) et des démarches pour les visas... Fred est super bien organisé, c'est un maniaque (dans le bon sens) de l'entretien de son vélo, notre tandem cracra fait pâle figure à côté et nous fait comprendre que lui aussi aimerait un entretien complet tous les 300-500 km. Mais nous au moins on a les décos de noël. On roule 1 journée de plus avec, au point où on en est :)
On discute un long moment au bord de la route, on échange pas mal d'infos et de conseils. On lui indique des coins sympas en Grèce, on parle matériel bien sûr, et aussi philosophie de voyage : l'intérêt du trajet plutôt que du but, que beaucoup ont du mal à comprendre par exemple. Vassilis à Athènes par exemple ne comprend pas vraiment pourquoi on fait ce voyage en vélo, qui prend beaucoup de temps à rouler, temps qui pourrait être utilisé de manière plus utile à visiter les lieux "importants" plus en profondeur ou en voir plus. Dans un sens ça n'est pas faux, mais je crois qu'il faut vraiment avoir pris son vélo pour comprendre pourquoi on fait ça. Mais essayons quand même.
Il y a 2 paramètres fondamentaux à prendre en compte : quand on prend 15 jours de vacances pour aller dans un pays on peut se permettre de se faire un méga shoot de visites, de musées, de restos, d'hôtels, ... on revient avec des souvenirs pour tout le reste de l'année... qu'on passe à bosser pour se payer les prochains 15 jours... Dans notre cas on est déjà sur la route depuis plus de 9 mois. On a visité quelque chose comme 20 pays quasiment autant de capitales ou villes majeures. C'est une masse d'informations colossales en "si peu" de temps. Comme vous l'avez probablement lu auparavant, on ressort complètement décalqués des visites des capitales parce qu'on ne peut décemment pas rester à rien faire, qu'on arpente le pavé dans tous les sens pour ressentir la ville, les différents quartiers, ... Du coup (2è paramètre), entre 2 grandes villes on aspire à du calme (et du repos). Et paradoxalement c'est via le trajet en vélo, la petite routine qui va avec qu'on retrouve un peu des marques, du calme, qu'on n'est plus obligés d'être prévenants envers des hôtes, qu'on n'est plus partagés entre se reposer ou sortir visiter un musée... bref le trajet en lui-même est vital à la meilleure appréciation des moments passés à "visiter". Quand vous rentrez parfois du boulot avec l'envie de vous cloitrer chez vous, de ne parler à personne, quand vous avez envie de passer un week-end sans sortir de chez vous à glandouiller, descendre un paquet d'épisodes d'une série télé, ... ben nous notre équivalent en quelque sorte c'est de rouler. On retrouve des choses qu'on connait, qu'on maitrise (pas besoin de passer des heures à chercher un couchsurfeur qui ne répond pas), on roule, on s'arrête quand on est fatigués ou que la nuit tombe, on fait nos petites pâtes Capellini numéro 1 (3 minutes) dans une soupe déshydratée au fond d'un champ ou d'une forêt, on a nos petites habitudes, rassurantes et qui nous permettent de ne pas péter un câble ni de saturer du voyage.
Refermons la parenthèse, disons au-revoir à Fred (qui lui aussi a mal à un genou) et reprenons la route. Il est déjà über tard, on n'a pas déjeuné, on a faim et encore plus de 30 bornes à faire. Ca s'annonce pas sous le meilleur angle.
Je convainc quand même Hélène de faire une petite pause pour déjeuner rapidement sans quoi j'ai un peu de mal à imaginer les heures de vélo à venir. On le fait en mode "rapide", à peine assis sur une pierre. Sandwiches un peu d'eau, quelques melomakarona et on repart. L'après-midi est un peu rude. Ca monte doucement mais sûrement, la moyenne n'est pas fameuse et quand on rejoint la "super strada" 100 (2x2 mais visiblement limitée à 90 km/h et conseillée par Fred un peu avant) il nous reste encore beaucoup de route à faire alors que les couleurs commencent déjà à prendre leurs jolies teintes rosées de fin d'après-midi.
Le soleil descend et passe finalement derrière l'horizon. L'avantage c'est qu'on voit mieux nos guirlandes clignotantes mais ça ne nous rassure pas. On écrase les pédales pour arriver à Gioia juste à la tombée de la nuit. On trouve sans souci notre B&B. La chambre n'est pas tout à fait à l'endroit de l'accueil, parfait ça sera encore plus tranquille. La dame ne parle pas anglais, on éprouve quelques difficultés à lui faire comprendre que le tandem ne rentrera pas dans l'endroit qu'elle nous propose pour l'héberger lui aussi et il finit donc... dans la pièce où on prendra notre petit déjeuner demain. Espérons qu'il soit sage et ne s'empiffre pas en notre absence.
La chambre est simple mais avec ces petits luxes qui nous ont un peu manqué dans nos dernières locations. Quelques meubles qui sont plutôt chinés ou récupérés de la "maison de mémé" plutôt qu'achetés par 5 chez Ikea. Des ampoules halogènes dans la salle de bains (si j'avais un blog sur le sujet ça me donnerait l'envie d'écrire un post dont le sujet serait "Non l'ampoule à économie d'énergie 7W ikea n'est définitivement PAS un moyen d'éclairer votre maison"), on a tellement été dans des endroits avec un éclairage minable que d'y voir un peu ici ça fait plaisir. Un sèche serviette (qui fonctionne), une vasque et une robinetterie modernes, une clim réversible discrète et agréable... bref ce B&B c'est le cadeau qu'on s'est choisi en remplacement des thermes/hammam proposés par notre beau-frère Lucas pour noël et qu'on n'a pas pu concrétiser. Cet endroit c'est notre petit coin "bien-être" pour 2 nuits, peut-être 3.
On profite donc de la douche, de la température agréable et on espère bien aussi profiter du lit pour y faire une nuit de 500 heures d'affiléeeeeeeeeee..... minimum. On profite également d'une grosse séance de découverte/approfondissement des chanteurs sentimentaliens. On avait déjà eu un peu une introduction via Sophie la secrétaire d'Hélène dans son précédent cabinet de diététique à Paris (Eroooosssss Rammmaaaaazzzooooootttttttiiiiiiii !!!!!!!) mais là via la télé/radio on lui découvre toute une panoplie de confrères et les clips ont beaucoup de points communs. Bon les gros plans flous sur le visage, la barbe de 3 jours, le costume avec la chemise ouverte, les bras aussi grands ouverts c'est important :-) Ce sont des classiques, mais on découvre aussi l'omniprésente de "la fan". Plusieurs clips montrent des images de concerts avec une fan qui monte sur scène, qui passe du temps avec SON chanteur, voire qui chante avec lui... ah et visiblement le chantasentimentalien a vendu son âme à Apple puisque "la fan" écoute son artiste préféré sur son ipod pas déguisé le moins du monde pendant que l'italochanteur joue avec son ipad ou à le kit mains-libres de son iphone à l'oreille... bon et puis pleins d'autres trucs qui nous font bien sourire mais on voudrait pas se brouiller avec Sophie alors je vais me taire. Sophie on taimmmmmmeeeeeeeeee.

267è jour : Gioia Del Colle (jour off)

4 janvier 2012

0 km, 10822 km au total

Ah le calme, le vrai. Le B&B est dans une toute petite rue où personne ne passe, il y a du triple vitrage, pas grand monde dans les autres chambres (en tout cas personne à notre étage où il y a 2 chambres) ce qui fait qu'on a passé une nuit de rêves. Ca fait du bien de dormir vraiment.
Du coup le réveil est agréable, on prend le petit déjeuner sur place (on découvre que le petit dej n'est pas inclus ce qui fait un peu mesquin pour un Bed AND Breakfast mais bon) puis on sort se balader dans Gioia. C'est vraiment une commune sympa. Beaucoup de vieilles pierres mais quelques belles restaurations modernes dans le style qu'on aime beaucoup : la pierre calcaire bien nettoyée, des huisseries gris anthracite et des grands vitrages, le tout en plein centre ville, très agréable. On profite du château, d'une vieille église très jolie, des micro-rues avec le linge qui sèche aux balcons, ...
On se dirige ensuite vers un supermarché pour faire les courses pour les 2 jours à venir (après-demain c'est l'épiphanie, et ici c'est férié et tout est fermé). On prévoit de prendre tous nos repas dans la chambre et c'est avec plaisir parce qu'on découvre aussi la richesse de la cuisine italienne, et on va commencer par une sérieuse remise à jour niveau pâtes. On profite du confort de la chambre pour se prendre des trucs un peu lourds ou encombrants genre pâtes fraîches, sauces en pots et même des fruits de mer surgelés pour accompagner les pâtes. On s'offre même une bouteille de vin de calabre (pas exceptionnel malheureusement). La note nous fait bien plaisir, certes le supermarché est un "discount" mais malgré certains articles un peu "luxe" on s'en sort avec une addition nettement moins salée qu'en Grèce.
On rentre par le chemin des écoliers mais tranquillement histoire de ne pas trop forcer sur les articulations douloureuses. On profite de notre premier déjeuner italien, c'est succulent... avec toujours ce petit goût d'interdit de faire la popote sur le guéridon et manger sur le lit.
On zappe sur la télé, on est déjà gavés des sentimochantalo, il faut dire que les mêmes chansons reviennent en boucle à un rythme encore plus impressionnant que le top 50 international. On a déjà vu des clips 4 fois sur la même chaine alors qu'on n'est même pas là depuis 24 heures et qu'on n'est pas vraiment restés rivés à la télé. Ca doit être ce qu'on appelle "une rotation lourde" en termes radiomarketing.
On voit une bande annonce d'une comédie américaine qui a l'air sympa et divertissante, mais c'est juste la bande annonce, et de toute façon les italiens ont la même manie pénible que les français : systématiquement tout doubler, séries, films, ... donc même si l'italien nous semble plus abordable que le turc ou le finlandais, on n'est pas vraiment prêts à regarder un film complet. Je sors donc de la chambre pour capter le wifi de la réception (point d'accès 3 étages plus bas) et trouve le film à télécharger. Une demi-heure plus tard (vive internet) on peut donc regarder "Crazy Stupid Love" en VO sous-titrée français. "that's the way it should always be"... enfin selon nous. Je me remémore ce que j'avais écris il y a de longs mois sur l'idée d'un monde "langue locale + anglais", plus nous avançons dans le voyage plus on se rend compte que c'est comme ça que ça devrait être. On a discuté avec beaucoup de monde, en français, en anglais, en "avec les mains"... et on aboutit à ce constat qu'en effet il est important de conserver une langue maternelle locale, parce que le langage est à l'origine même de la diversité, que chaque langue possède des mots propres à son pays d'origine, parce qu'imaginer l'anglais comme langue unique risquerait fortement d'être un nivellement par le bas, une espèce d'intersection de diagramme de Venn où on ne conserve que ce qui "parle" à tout le monde et on oublie toutes les subtilités... on le constate déjà souvent dans nos échanges où les "something like that" viennent remplacer les mots précis pour expliquer quelque chose. Bref il est important de conserver sa langue "natale" et d'y ajouter l'anglais comme langue d'échange avec le monde, comme langue de travail, de commerce... et pour exactement les mêmes raisons il serait intéressant de conserver les langues d'origine des films. Un film indien devrait être en indien sous-titré langue du pays où le film passe, comme c'est le cas dans quasiment tous les petits pays qui ne peuvent pas amortir le coût d'un doublage.
Enfin bref, devant la télé italienne, même si on a un truc genre satellite avec 50 chaînes, tout est en italien :-( et même si ça peut être sympa sur certaines émissions visuelles (genre cuisine) sur une série ou un film c'est vite pénible. On a une petite pensée pour tous les étrangers qui allument une télé française et qui sont confrontés à la même chose.
On profite donc tranquillement de cet après-midi, exactement comme on le désire, en se reposant, en regardant le soleil se coucher (aie on a bien perdu de ce côté là, il se couche à 16h37 le petit malin). On dine sur le même concept que le déjeuner, révise un peu d'espagnol (j'ai du retard à rattraper et je sens que ça va être compliqué de travailler l'espagnol en Italie étant donné la proximité des langues) et on finit notre saison 18 de TAR avant de rejoindre Morphée.

268è jour : Gioia Del Colle (jour off)

5 janvier 2012

0 km, 10822 km au total

Le plus difficile aujourd'hui consiste à descendre avant 10h au rez-de-chaussée pour dire au gérant du B&B qu'on reste bien une nuit de plus, qu'on ne prend pas le petit dej et voir où en est notre linge qu'on a confié pour faire une machine à laver. Ca va, le programme n'est pas trop violent. On poursuit activement notre repos :-) Mac Gyver en italien ne nous passionne pas, les émissions de cuisine (ça a l'air d'être une institution ici) finissent par nous lasser un peu, on sort donc notre disque dur plein de films pour faire une petite sélection du programme de la journée. Je ne crois pas l'avoir écrit, mais à Paris on était des gros cinéphiles et depuis le début du voyage on n'a pas vu grand chose. Ca sera cool quand on rentrera en France on va avoir plein de nouveautés en retard, ça fera pas mal de choix, mais en attendant, parfois ça nous manque quand même un peu. Je crois que c'est un ensemble, une petite partie de notre vie parisienne qu'on aimait bien : le diner peinards affalés sur le canapé devant un bon thriller. Le petit thé tout au long d'une série un dimanche après-midi pluvieux... ce genre de chose : certes le film ou la série mais aussi le contexte "coocoon" qui va avec : chaleur, confort, tranquillité... donc aujourd'hui on en profite un peu pour renouer avec les vieilles habitudes.
Vers 13h on reçoit la visite de nos vêtements fraichement lavés... comment dire... la surprise vient du fait qu'ils n'ont pas été lavés sur place dans la machine à laver locale... mais envoyés au pressing.... RHAAAA. On ne vous raconte pas la note, ça fait bien mal ! Petite pensée pour Sethi Ramit (un blogueur américain) qui entretient un compte bancaire "stupid mistakes" (erreurs stupides) où il verse un peu de sous chaque mois histoire d'éponger sans s'insurger les erreurs du genre de celles qu'on vient de faire. On aurait du approfondir la discussion sur le sujet pour savoir où allaient aller nos vêtements mais vu l'absence d'anglais dans le trousseau de langues de notre hébergeur on est restés sur la base, déjà faire comprendre "machine à laver" n'a pas été simple alors faire la différence entre pressing et machine on n'avait aucune chance :-( Tant pis, c'est comme ça qu'on apprend.

269è jour : Gioia Del Colle - Masseria Marinella

6 janvier 2012

52,3 km, 10874 km au total

Pliage, rangeage, et on descend nos affaires pour les mettre - à l'intérieur du bâtiment - sur le tandem. Pourquoi à l'intérieur ? Parce que comme prévu il fait un temps pourri de chez pourri. Pluie et méga grand vent. L'avantage c'est que le vent est pour une fois favorable.
Le B&B refuse notre CB - parce qu'il y a un problème avec la machine - mouais, on commence à bien la connaître celle là :) Au moins le gérant m'emmène en voiture près d'une banque pour tirer du cash. Là aussi ça sent la gestion pas forcément 100% légale...
On quitte le B&B et au bout de 100 mètres je me dis qu'il est de nouveau temps de regonfler le pneu arrière. Ca fait quand même depuis Stavros qu'il ne tient plus bien la pression mais c'est assez variable le temps que ça met pour passer de "gonflé à bloc" à "risque de pincement de la chambre à la prochaine bosse". Je retire le capuchon de la valve... et cette dernière me reste dans les doigts. Il pleut, il vente, et bien sûr c'est aujourd'hui que cette valve Schwalbe à la c*n nous fait le même coup que la précédente en France. C'est la première fois qu'on voit des valves se dévisser, 2 chambres Schwalbe, 2 fois le même problème ! J'arrive néanmoins à la revisser à peu près, espérons que ça tienne encore un peu. On attend des pneus neufs à Chiaravalle d'ici une semaine, ça serait cool de tout faire en même temps : chambre neuve et pneu neuf, on ne démonte qu'une fois. On verra bien.
On prend donc plein sud, vent dans le dos, 14 m/s (dans les 50 km/h) en plus ça descend. La moyenne s'envole puisqu'on dépasse les 24 km/h à midi. Les rafales sont impressionnantes et dès qu'on n'est plus 100% dans le sens du vent on comprend notre douleur. La pluie nous fouette le dos plutôt que le visage, là encore c'est un bon point. Néanmoins c'est vraiment la tempête !
Pour le déjeuner on constate qu'il n'y aura aucun bled sur notre route donc aucun arrêt de bus. On prend donc un petit chemin (rhaaa les vent de face) pour aller vers une ferme. Après un premier micro hangar malheureusement inaccessible on poursuit et rentre dans une espèce de cour de maison/entreprise totalement vide. Il y a un grand préau pour nous abriter. Hélène est congelée et il lui faudra du thé et une soupe chaude avant de commencer à se sentir un peu mieux. Moi j'ai les pieds bien froids. Les chaussettes étanches commencent à être fatiguées et même si l'eau ne rentre pas totalement à l'intérieur, le fait qu'elle imbibe la partie extérieure fait que ça refroidit bien les pieds. On essaye de se réchauffer en regardant le vent secouer les arbres, arracher les tôles, c'est impressionnant.
On repart avant de se recongeler et histoire de rouler en début d'après-midi et trouver à bivouaquer pas trop tard. Après une petite accalmie n se reprend une bonne saucée. On rejoint quasiment la mer et on oblique vers le sud-ouest et on a donc le vent un peu de côté. Avec les rafales la maniabilité du tandem en prend un coup mais on tient néanmoins le cap. On rattrape une grande route, probablement celle qu'on suivra désormais un bon moment le long de la côte pour rejoindre la Calabre.
Quand le compteur affiche 50 km et qu'il est 15h passées on sort de cette nationale pour trouver un nouveau champ d'oliviers. On trouve facilement mais c'est très très humide, terre bien collante, olives écrasées et paille pour embourber un peu plus les chaussures et le vélo, super.
On profite du fait qu'il n'est pas trop tard et qu'il ne pleut plus pour retirer les décorations de noël. Petit pincement, c'était sympa, même si pour le chargement du vélo ça compliquait un peu. Le tandem à l'air tout nu, ça fait bizarre, on s'était habitués.


270è jour : Masseria Marine - Borgata Marinalla

7 janvier 2012

62,2 km, 10937 km au total

La pluie a laissé place au soleil qui se lève doucement mais bien agréablement. Par terre ça reste néanmoins très boueux et nos chaussures font facilement 3 kilos pièce et des bruits de succion à chaque pas. On repart vent de 3/4 arrière, ça c'est toujours bien appréciable. Dès qu'on s'arrête on caille vraiment, dès qu'on roule ça va mieux.
On se fait un petit arrêt regonflage de pneu (encore) et j'en profite pour faire une micro-révision : resserrage des freins, huilage des chaînes. On verra plus tard pour retendre l'excentrique car ça prend un peu plus de temps et généralement on s'en met plein les mains. La chaîne avant fait une jolie courbe vers le bas qui nous indique qu'il est pourtant temps de s'en occuper.
La route principale (SS 106) est plutôt agréable, large bande d'arrêt d'urgence la plupart du temps et trafic tout à fait raisonnable.
On en sort pour se trouver un supermarché, et après pas mal de détours on tombe sur un Penny Market, ça nous fait sourire car la dernière fois qu'on a été dans un de ces magasins c'était en Roumanie après des jours à bouffer des trucs dégeu et on se souvient parfaitement de notre sourire jusqu'aux oreilles, fous de joie de trouver ce qu'en France on considèrerait comme un discount très moyen. On trouve néanmoins tout ce qu'il nous faut, notamment du jambon "sec" à des tarifs enfin abordables (on attendait ça depuis longtemps), des pâtes fraîches qui ont l'air sympa, du Gran Padamo (genre de Parmesan)... bref on est satisfaits de nos achats.
On reprend la route (oui toujours) et on se trouve un peu plus loin une entreprise désaffectée qui nous offre une petite protection contre le vent tout en étant au soleil. Le vent a malgré tout la fâcheuse manie de donner l'impression qu'il fait -10°C alors qu'il en fait 20 de plus mais on survit.
Après-midi tranquille qui signe le retour du paysage qu'on aime tant : mer d'un côté, route au milieu et montagne de l'autre. On se fait aussi quelques tunnels, un peu imprévus mais visiblement pas interdits au vélos. Le plus long fait quasiment 1,4 km mais c'est super bien éclairé, on y voit mieux qu'à l'extérieur :) Hélène a super mal aux fesses, moi côté genou c'est pas la joie non plus donc on cherche à bivouaquer pas trop tard.
Malheureusement ce nouveau paysage signifie également plus de difficultés à trouver à bivouaquer. Les versants sont abrupts, la mer et le chemin de fer ne laissent pas beaucoup de place et la Super Strada (route nationale 2x2 voies) ne facilite pas non plus le choix de l'endroit vu que pour en sortir il faut attendre une bretelle "officielle" sinon c'est glissière de sécurité tout du long.
Après une première tentative sans succès nous reprenons la route pour quelques kilomètres. Le soleil qui se couche déjà tôt va disparaitre encore plus tôt derrière les montagnes !
2è tentative au raz de la mer derrière quelques propriétés. L'accès par la plage est très caillouteux, galleteux pour être précis. On va voir chacun notre tour si ça peut le faire. On est moyen convaincus mais le soleil ne nous laisse désormais pas trop de choix sachant que si on poursuit notre route on va traverser une nouvelle commune ce qui rend le prochain lieu de bivouac potentiel trop loin.
On pousse le tandem dans les caillasses, je m'explose la malléole de la jambe au genou fatigué histoire d'en rajouter une couche et on aboutit sur notre champ pas plat pour un sou. On finit par planter la tente sur le chemin, vu l'accès on ne risque pas de déranger qui que ce soit. On est à 10 mètres de la plage, 20 de la mer, c'est superbe mais très très venteux. Il faut bien être 2 et un paquet de sardines pour monter la tente correctement. Une fois à l'intérieur tout va tout d'un coup beaucoup mieux et au chaud dans les duvets c'est encore 2 fois plus mieux. C'est le petit bonheur du soir, après s'être lavé (rhaaa c'est froid), habillés (vite il caille), c'est de se glisser dans le sac de couchage, sortir l'iphone et l'ordi pour le geek et le kindle pour la geekette.
Tiens d'ailleurs je vais aller bouquiner moi. Après avoir terminé Vendetta de Roger Jon Ellory, livre assez passionnant sur la mafia aux Etats-Unis je viens d'entamer The Hidden Child le dernier bouquin de Camilla Lackberg, l'écrivain suédoise qui situe ses histoires dans la petite ville de Fjällbacka où nous sommes passés au printemps dernier. C'est marrant car moi je lis un bouquin papier pendant qu'Hélène est sur le kindle, le monde à l'envers. En tout cas même si j'avais un peu peur de renouer avec la lecture d'un roman en anglais je dois avouer que c'est finalement avec plaisir que je renoue avec un vocabulaire un peu plus châtié, avec des mots "nouveaux", avec une manière de "parler" qui change de l'anglais de base parlé pour se faire comprendre. Je vous parlais du "something like that" petit tic de langage qui vient remplacer les mots précis chaque fois que le terme ne nous vient pas à l'esprit, dans le cas du livre c'est agréable d'avoir l'explication précise, avec les termes exacts. Je pense que c'est aussi un moyen d'apprendre un peu de vocabulaire et de tournures de phrases. Même si notre anglais s'est largement amélioré depuis le départ, c'est surtout sa fluidité et la vitesse à laquelle les mots que nous connaissons nous viennent à l'esprit qui ont évolué. Après d'un point de vue vocabulaire, même si on essaye régulièrement de chercher dans le dico certains mots qui nous manquent on a du en chercher une trentaine depuis le début du voyage, pas vraiment de quoi améliorer notre champ lexical. Corrugated iron... ouais tôle ondulée messieurs dames, je vous l'ait déjà écrit, mais vous vous en souveniez ? ça c'est utile dans la conversation... ben si, imaginez que vous parlez de bidonvilles, ben ça peut servir.
Allez cette fois j'y vais vraiment, et puis il faut aussi réchauffer un peu Hélène qui a froid aux mains (et au nez).
Bon en fait je n'ai pas lu longtemps, l'appel de la lune était trop fort et je suis donc sorti avec mes 3 pieds pour aller faire des photos. La mer, les galets, le ressac, les villes au loin, les ruines d'un fort, ... je ne sais pas trop ce que ça va rendre mais à première vue il y a quelques images sympa.

271è jour : Borgata Marinalla - Oliveto Longo

8 janvier 2012

57,7 km, 10994 km au total

Le lever de soleil est magnifique même si notre astre préféré va ensuite se cacher derrière des gros nuages. Nous reprenons notre chemin caillouteux en sens inverse puis la route qui longe la côte au plus proche, c'est plus calme que la super strada et passe dans les petits villages. Malheureusement au bout d'un moment on ne peut plus poursuivre, toujours cette problématique de ponts : quand il y a une rivière perpendiculaire à la route, souvent les plus petits chemins n'ont pas le droit à leur pont... il faut prendre la route principale. Néanmoins la SS est toujours relativement agréable. Bon bitume et pas trop de voitures en ce dimanche matin. Le vent par contre - après une accalmie en fin de nuit - est bien de retour, et pas vraiment en notre faveur cette fois. On continue notre route en alternant les moments proches de la mer et ceux un peu plus loin. Ca ressemble vraiment à la Grèce mais la "grande route" est plus abordable que l'autoroute grecque !
Le côté très sympa c'est que partout il y a des châteaux, des ruines, des tours, ... on sent que la côte a été fortifiée et utilisée pour protéger l'entrée dans le pays pendant pas mal de temps. Du coup c'est agréable de faire 10 km, découvrir un nouvel édifice, poursuivre et 20 bornes plus loin tomber nez-à-nez avec un autre château...
En fin de matinée, l'estomac gargouillant on se pose à l'intérieur d'un centre commercial. Depuis nos premiers tours de roue ce matin on a vu des panneaux "centre commercial à 15 minutes". Il nous aura fallu 2 heures de vélo pour l'atteindre ! On fait nos sandwiches tranquillement sur un banc en regardant les gens passer. C'est toujours amusant d'observer les fringues, les attitudes, ... on remarque aussi qu'en Italie c'est également les soldes. "Tutti -50%". Un Intersport nous nargue mais on n'a besoin de rien, on compte sur nos colis qui on l'espère nous attendrons à Chiaravalle d'ici 4/5 jours maintenant. Finalement on trouve un peu idiot d'être à 20 mètres d'un grand Auchan et de ne pas y aller alors que demain matin nous devrons faire des courses pour ravitailler. Direction donc le supermarché où nous constatons une nouvelle fois l'ampleur du rayon pâtes. Ca n'est pas un mythe ! Côté sauces par contre on est un peu déçus. Des dizaines de mètres linéaires de sauce tomate "pure" (pulpe, concentré...), beaucoup de pots en verre mais pas vraiment les sauches qu'on trouve en France genre aigre douce ou ce genre de chose. Côté déshydraté c'est la dèche totale. Une seule soupe pourra venir aromatiser nos pâtes et pour la 2e fournée ça sera donc concentré de tomates et bouillon kub. Les pâtes seront de nouveau fraîches, des ravioles à la viande et d'autres aux épinards. On continue à trouver de la coppa et autres jambons secs à des tarifs corrects, l'addition est donc de nouveau respectable, ouf.
Du coup avec ce plan pique-nique enchaîne directement avec les courses, il est moins de 14h quand on repart, ce qui n'arrive quasiment jamais quand on se pose dans un champ. On fait donc une vingtaine de kilomètres et on se trouve un champ d'orangers où planter la tente avant 15h30, ce qui est parfait pour la suite du programme... Mais avant il faut quand même avouer qu'on constate une différence notable entre la Grèce et l'Italie : ici 90% des champs d'oliviers ou d'orangers/clémentiniers/... sont fermés. Grillage tout autour, grille et cadenas devant, bref c'est pas le paradis du cyclobivouaqueur ! Celui de ce soir est tout entouré mais l'entrée est totalement ouverte. On a vérifié, pas de grille car on imaginait le plan sympa : tu rentres car la grille est ouverte, tu t'enfonces et te planques entre des arbres et quand tu veux repartir le lendemain matin tu constates que que quelqu'un a fermé la grille à clé entre temps... grand moment de solitude... qu'on aimerait éviter :-)
L'arrêt de bonne heure nous permet 2 choses "en attente" :
- le fameux retendage de chaîne primaire du tandem. Ca y est on est au bout de l'excentrique alors qu'elle n'a que 2000 km, on avait constaté que même neuve l'excentrique était déjà bien avancé pour que la chaîne soit tendue, c'est bizarre car normalement les espaces entre les maillons sont censés être identiques pour toutes les chaînes... bizarre... c'est pas la même marque que d'habitude, on regrette un peu nos SRAM 971 pour les connaisseurs, mais la facture de Stockholm nous avait un peu laissé un mauvais souvenir. Peut-être que les prochaines on les commandera sur le net à tarif discount et qu'on trouvera un moyen de les récupérer quelque part...
- couture :-( Bon avec Hélène on a dit qu'on appelait plutôt ça "atelier broderie" parce que c'est plus vendeur mais ce soir : 1 talon de chaussette, les "doigts de pieds" d'une autre, des coutures sur 2 cuissards différents et des trous dans mon t-shirt rouge (conseil : n'achetez pas de t-shirt Smartwool il sont doux et super agréables à porter mais trop fragiles par rapport aux Icebreaker)
Ensuite enfin Hélène peut lire et moi écrire :-) On dirait qu'il y a un stand de tir pas loin (encore oui) mais sinon c'est à peu près calme. Moins idyllique qu'hier soir car plus proche de la route principale, mais on devrait être bien.
Bon en fait le petit chemin à l'intérieur du champ est fréquenté puisque 4 voitures passent et 2 s'arrêtent. Je sors faire la conversation, et comme depuis qu'on est arrivé en Italie, personne ne parle anglais. J'essaye donc à 2 reprises de mimer "vélo - dormir - 1 - vélo" et les 2 fois on me fait un "ok" sans grande conviction mais au moins on nous laisse tranquille.

272è jour : Oliveto Longo - Marina Di Strongoli

9 janvier 2012

69,8 km, 11064 km au total

Ce matin - alors que la météo annonçait 7-9°C - il y a du givre sur le toit de la tente et le thermomètre confirme qu'il caille bien plus que ce qu'on avait anticipé. Mon duvet s'est ouvert dans la nuit (la fermeture descend petit à petit si on ne la bloque pas en haut avec le scratch) ce qui fait que j'ai un peu caillé. Hélène aussi, mais elle c'est avec duvet fermé :)
Le soleil est néanmoins de la partie, on attend un peu de pluie dans la journée, on croise les doigts, on verra bien.
On reprend le magnifique parcours le long de cette mer bleu azur, c'est magnifique, les trous dans les nuages font ressortir le bleu et de l'autre côté le vert des montagnes. Hélène répète "c'est quand même magnifique" à peu près tous les 2 kilomètres, mais il faut dire qu'elle a raison.
On passe les 11 000 km perdus dans nos pensées. Ce n'est qu'un kilomètre plus tard qu'on percute. Mince pour la photo, c'est la première fois que ça nous arrive ! Tant pis ça n'est pas bien grave, le plus important c'est quand même de se dire qu'on a fait onze mille bornes sur le tank, que ça fait 272 jours qu'on arpente les routes européennes et qu'on adore toujours autant notre voyage.
La route s'est aussi rétrécie et n'est plus qu'à une seule voie et elle passe désormais plutôt à l'intérieur des bleds alors qu'auparavant elle les contournait côté terre. On perd notre bande d'arrêt d'urgence ce qui rend finalement le parcours plus dangereux qu'auparavant, j'imagine que ça vous étonne toujours autant mais on préfère les 2x2 que les petites nationales "monovoies" chargées. Aujourd'hui on a de nouveau le vent dans le dos, c'est bien appréciable.
Lors d'un check d'emails sur l'iphone via un point d'accès trouvé sur la route je constate qu'on n'a jamais reçu d'avis d'expédition de notre nouvelle poche à eau. Je recherche tous les emails, ne trouve rien, je vais sur le site voir le suivi de commande "traitement en cours"... hum j'adore. Commande le 29 décembre, produit en stock... et toujours rien. Je me fends donc d'un petit email pour annuler la commande tout en ayant un infime espoir que l'info d'expédition n'a pas été remontée pour cause d'envoi "spécial" car ne passant pas par la poste française étant donné la commande sur un site FR et livraison en Italie... on verra bien mais ça s'annonce plutôt mal :-(
Ce midi comme ce vent est toujours aussi violent et qu'on a la tente à faire sécher... on la monte. C'est agréable de pique-niquer à l'abri. Quand il y a du soleil on est vraiment bien... Hélène juge même le moment parfait : "j'ai bien mangé, il fait chaud, je peux me reposer et bouquiner, je suis avec l'homme de ma vie, que demander de plus ?"... mais on se caille malgré tout vite dès que le soleil se cache.
On a bien roulé ce matin donc on se prévoit une petite après-midi. On a désormais une assez bonne estimation du nombre de kilomètres pour rejoindre Chiaravalle, on sait donc qu'on n'a pas besoin de trop rouler pour y être jeudi soir. On pourrait même y être mercredi soir, mais comme ça se termine par 20 bornes de montées on se dit qu'il vaut mieux prévoir une petite journée quasiment juste pour ça plutôt que de terminer une journée un peu longue par de la montagne et le soleil qui décline et se couche derrière alors qu'on n'est encore qu'à la moitié de notre grimpette !
On reprend donc tranquillement notre embarcation pour une petite heure maxi de vélo... mais quand on commence à chercher un lieu de bivouac c'est la catastrophe. Il y a plus de vignes et moins d'oliviers ou d'orangers et tout ce qu'on trouve est vraiment cadenassé, entouré, grillagé, cloturé, barriéré.
Je tente une petite balade derrière une barrière pour aller voir un endroit un peu accueillant et croise une voiture, j'entame la discussion (toujours pas un mot d'anglais) et on me fait comprendre que "non je peux pas aller là". Bon tant pis.
On reprend la route, fait encore une dizaine de kilomètres sans rien trouver de plantable, ah là-bas peut-être... ah non c'est trop visible, pas assez caché, pas plat, trop proche des habitations, ... on baisse pourtant fortement notre exigence sans rien trouver pour autant.
Alors que le soleil va passer derrière les montagnes on sort de notre route principale pour s'approcher un peu de la mer, il y a beaucoup de choses fermées en cette saison, donc peut-être une maison en abandon de construction, un champ entouré de maisons fermées... mais toujours rien. On poursuit, se trouve nez à nez avec un gué. Oups on le sent pas, mais un vélo nous double et le passe sans trop de souci, nous informant au passage de la profondeur. On traverse donc sans trop se mouiller les pieds et poursuit. Une maison abandonnée, mouais mais le jardin est un cauchemar pour y planter une tente... on poursuit. Un petit chemin qui semble rejoindre la mer. En fait il ne rejoint rien d'autre qu'un champ de vignes et de on ne sait quoi. On traverse le on ne sait quoi à pied en poussant le vélo dans la terre et on aboutit enfin sur une espèce de plaine sableuse, en plein vent mais suffisamment loin de tout pour y planter la tente sans craindre d'être visibles ou dérangés.
On plante tranquillement en écoutant le bruit impressionnant de vagues qui semblent s'écraser sur des rochers au loin. Au bout de quelques minutes il faut se rendre à l'évidence, ça n'est pas la mer... mais l'orage au loin. Quelques beaux éclairs nous confirment qu'il est temps de se presser un peu, de planter les sardines aussi profond que possible et de croiser les doigts avant de se faire secouer.
Je sors faire quelques photos et constate qu'on a peut-être une chance de passer au travers. On est juste au bord de l'orage qui s'approche vers nous, mais le vent le pousse aussi plus au sud en même temps qu'il l'approche. Je retrouve Hélène en train de galérer avec le tarp qui s'envole. On essaye de bien le fixer mais on prend quand même bien peur. Si l'orage finit par se déchainer sur nous on risque de bien morfler. Normalement la tente tient sans sardines et le double toit n'est pas censé pouvoir s'envoler si on est dans la tente mais si les 2 sardines des absides ne tiennent pas on risque le contact des 2 parois, et si le vent est trop fort une petite casse d'arceaux vers 3 heures du matin peut être un moment mémorable...
On traine dans la tente, incapables de se déshabiller pour se laver étant donné la fraîcheur du vent, on boit notre petit thé du thermos resté intact aujourd'hui, l'accompagne de petits gâteaux avant de se décider enfin à rejoindre la salle de bains :)
L'orage semble s'éloigner mais le vent reste bien fort. Ce soir on s'écoute un peu de musique pour se changer les idées, c'est un truc qui nous manque un peu d'ailleurs. On est partis avec une sélection musicale réduite et définie de manière ultra arbitraire, on a des mp3 sur l'ordi et sur l'iphone (mais on peut pas en mettre de nouveaux sur l'iphone, rapport à Steve Jobs qui pensait que c'était comme ça que ça devait être et pas autrement) donc on se contente de ce qu'on a.
On est très en retard ce soir mais peut-être que demain on retentera une nouvelle grasse-mat... parce qu'en fait ce matin on s'est levé comme d'habitude :-)

273è jour : Marina Di Strongoli - Soverito

10 janvier 2012

43,7 km, 11108 km au total

Quelle nuit mes amis, quelle nuit ! Tiens j'ai déjà écrit ça il y a quelques mois. L'orage d'hier s'est finalement éloigné mais le vent est resté très violent, l'orage est revenu dans la nuit, il nous a épargné dans l'ensemble mais on s'est quand même pris un peu de pluie. Le vent fait que ça cogne toujours un peu dans le matelas ou l'oreiller, bref ça a tendance à réveiller régulièrement. Ce matin donc, 2 heures de rab.
Le soleil au lever c'est quand même agréable. Ca nous permet d'ailleurs de voir une tache de lumière inhabituelle sur la tente intérieure... on regarde de plus près... oups... il y a une déchirure dans la toile extérieure. Justement hier soir on réfléchissait sur l'endroit où ça lâcherait si jamais le vent était ultra violent... eh bien aucun de nous deux n'avait imaginé que ça serait au milieu de nulle part que ça se déchirerait.
Je répare au gaffa, à première vue ça peut tenir. On verra dans le temps avec l'humidité et la tension. Décidément ça continue les soucis de matos. A croire que pour faire des voyages tranquilles il faut s'arrêter au bout de 6 mois, changer l'intégralité du matériel et repartir. Ca risque de coûter cher.
Alors qu'on commence à plier un monsieur traverse le champ à côté de nous et vient nous voir. Il nous a vu hier soir et s'inquiétait un peu de la qualité de la nuit qu'on avait pu passer. Sympa. Il ne parle pas un mot d'anglais mais on progresse à vitesse grand V en italien. On lui file nos cordonnées pour qu'il puisse voir éventuellement les photos mais il n'a pas internet, mais ses enfants si. Du coup il part et revient 5 minutes plus tard avec les coordonnées de son fils et on comprend qu'on est cordialement invités à revenir en été et à dormir cette fois à l'intérieur :-)
Avec tout ça il est plus de 10h15 quand on fait nos premiers tours de roue, mais ça correspond assez bien à notre programme. Le temps est correct, soleil avec de gros nuages parfois menaçants mais à priori pas de pluie à prévoir. On reprend donc, vent dans le dos notre descente vers le sud, direction Crotone (prononcer à l'italienne :-) Les kilomètres filent vite grâce au plat et au vent. On passe de nouveau devant un grand Auchan et on ne résiste pas et on s'arrête de nouveau faire des courses anticipées. Ces derniers temps le tandem est plein à craquer de bouffe, ça devient inquiétant car ça dépasse largement nos 2 sacoches avant prévues à cet effet et suffisantes en temps normal. On en profite pour manger au chaud, cette fois carrément sur la table d'un petit café dans la galerie, pas romantique pour un sou mais bien pratique. On s'offre un latte machiatto et un expresso (donc ça y est on a compris, l'expresso français, cad la petite tasse pleine = expresso lungo en Italie et en Grèce). Pour avoir un expresso dans une tasse plus grande là par contre aucune idée.
On traine un peu au chaud avant de reprendre le vélo. Ca souffle toujours autant et à l'arrêt il fait vraiment froid. On poursuit donc pleinement à vivre ce que tous les cyclotouristes connaissent bien, l'effet "je garde ma polaire pour commencer vu comment il caille, pas moyen de faire autrement... et de s'arrêter 500 mètres plus loin pour la retirer".
L'après-midi annonce le retour du relief, en effet la route coupe un peu au travers d'une petite montagne, 150 mètres, pas grand chose, mais qu'il faut attaquer avec un pente à 10%. Le paysage est néanmoins splendide, ce qui aide un peu. En haut, un grand plateau sur lequel ils ont réussi à caser un aéroport puis une belle redescente vers la mer. Splendide.
On peine une nouvelle fois à trouver un coin bivouac mais ce soir on ne sera pas obligés de faire 20 bornes. On se trouve un petit chemin qui s'enfonce entre un champ de fenouil et une rivière en direction d'un parc éolien. Pas de surlargeur mais le chemin n'a pas l'air beaucoup fréquenté, on plante donc directement dessus en se pressant un peu car au loin le même programme qu'hier s'annonce. De nouveau on estime qu'on devrait s'éviter l'orage et la pluie violente mais autant parer à toutes les éventualités, nous ne sommes pas des as de la météo et on n'est pas à l'abri (c'est le cas de le dire) d'un retournement de situation.
On profite du soleil qui se couche, décidément toujours trop tôt à notre goût, mais avec des couleurs magnifiques. On a la vue sur la mer au loin, on adore, et notre petit chemin est un peu enfoncé et devrait nous offrir une relative protection contre les éléments s'ils venaient à se déchaîner contre nous.

274è jour : Soverito - False

11 janvier 2012

48,6 km, 11156 km au total

La tempête est bien venue dans la nuit, vent violent et pluie au programme mais finalement moins pire que la nuit précédente. La tente a tenu le coup, cool.
Nous quittons nos éoliennes (qui font bien du bruit) sous une météo plutôt ok (soleil entre quelques gros nuages) et à peine 3 km plus loin il est temps d'immortaliser le compteur : 11111 km le 11/1 pas mal non ?
Pas grand chose à dire aujourd'hui, journée tranquille, météo correcte, paysage toujours très sympa, relief plutôt doux, bref tout roule.
On passe devant une boulangerie-pâtisserie qui semble sympa, freinage d'urgence et Hélène part à l'assaut... ben oui il est plus que temps d'aller découvrir les spécialités italiennes. Elle ressort avec un petit assortiment de petits gâteaux qui sont assez originaux et plutôt sympa et bons dans l'ensemble.
Après un arrêt pique-nique dans un champ d'oliviers ouvert (mais oui) on tombe nez à nez avec un Décathlon. Peut-être (soyons-fous) une poche à eau ? On a assez peu d'espoir mais on compte sur les cuissards D4 pour Hélène qui a super mal avec la peau de chamois d'un des siens et qui du coup utilisait le deuxième beaucoup plus... mais ce dernier fatigue au niveau des élastiques des jambes.
Bref pour la poche à eau c'est vite vu, le drame Décathlon dans toute sa splendeur. Ok on est bien contents de le trouver aujourd'hui mais il faut avouer qu'outre le fait d'avoir tué les petites boutiques de matériel de rando & co, D4 a surtout transformé ses rayonnages de bons produits de marques réputées par ses propres merdes faites pour les sportifs du dimanche. Alors c'est sûr que le sportif du dimanche représente 95% de la population, le sportif en question c'est justement celui qui vient de prendre la bonne résolution de "se mettre au sport" il y a 11 jours et qui court (enfin va en voiture) chez D4 pour s'acheter un vélo et l'équipement complet jaune fluo... et qui s'en servira 2 fois... ah non en fait la seconde fois c'était pour prêter à son beau-frère. Pour les filles c'est la tenue complète de running ou de stretching machin chose qui va avec l'abonnement à la salle de sport qui tous les deux ne serviront d'ailleurs pas beaucoup plus.
Bref du t-shirt en plastique qui pue et de la couture faite avec du fil fragile déjà pré-cassé ça il y en a à la pelle. Par contre du MSR (notre espoir en poche à eau) il n'y en a pas la moindre trace. Des chaussettes en laine mérinos pareil, aucune trace dans aucun rayon.
On trouve néanmoins 2 cuissards pour LN, dont un long, ça sera l'occasion de tester. Je trouve aussi des surchaussures neuves (pas D4) pour remplacer les miennes (D4) qui commencent à être très fatiguées.
Serait-ce l'occasion de faire un point sur mon système "pour les pieds" ? Ok, allons-y. Donc pour ceux qui n'ont pas suivi, j'ai délibérément fait le choix suite à notre périple très humide en Angleterre de ne pas prendre de chaussures fermées mais de ne partir qu'avec des sandales. En effet au bout de quelques dizaines de kilomètres sous la pluie les chaussures pour vélo "à cales" prennent l'eau par les cales. Le système traverse la semelle et n'est pas étanche. Donc mon approche est la suivante :
Quand il pleut je mets des chaussettes étanches dans les sandales.
Quand il fait froid je mets des surchaussures, éventuellement aussi les chaussettes étanches.
Quand il fait beau et pas trop froid, des chaussettes normales et les sandales et ça roule.
Après 11 000 km je dois avouer que le système me convient assez bien. Les sandales choisies sont plutôt passe-partout et avec des chaussettes noires ça ne fait pas trop plouc. Côté pluie jusqu'à présent ça s'est plutôt bien passé même s'il va être temps de changer les chaussettes étanches qui commencent à prendre l'eau car elles sont un peu usées. La membrane doit être percée donc forcément c'est moins utiles. Néanmoins pour le froid et le vent elles restent bien utiles.
Les surchaussures sont indispensables quand il fait autour de zéro car sinon ça caille sévère.
Le système est très adaptable et je ne pense pas avoir eu plus froid aux pieds qu'Hélène qui a des chaussure de rando bien fermées et des surchaussures fines, juste étanches.
Quand il fait beau et un peu chaud (>12-15°C) rouler avec juste les chaussettes normales dans les sandales est très agréable et évite de trop transpirer et mijoter dans les chaussures.
Côté séchage c'est aussi tout à fait correct. Quand il pleut les chaussures sont trempées, ça demande donc parfois le soir un petit plan "sac plastiques autour des chaussettes de bivouac" histoire de ne pas mouiller ces dernières, mais généralement le lendemain matin même si les sandales ne sont pas totalement sèches elles sont suffisamment "essorées" pour que leur humidité résiduelles ne trempe pas les chaussettes sèches que je porte alors.
Bref je suis content de mon choix à ce niveau là.
Après les errances dans les dizaines de rayons et les essayages il est temps de repartir, de faire quelques kilomètres et de trouver à bivouaquer.
Ce soir on dort dans un espèce de terrain pas encore construit près de résidences principalement secondaires. Ca a l'air calme hormis la proximité de la ligne de chemin de fer... et des oiseaux dans les pins qui piaillent comme des dingues jusqu'au coucher du soleil qui arrive d'ailleurs très vite. Espérons que la lune quasi pleine ne les incite pas à reprendre leurs chants tout à l'heure.


275è jour : False - Santa Lucia (Chiaravalle)

12 janvier 2012

34,6 km, 11191 km au total

Nuit calme, finalement pas vraiment de trains, c'est cool. J'ai d'ailleurs même du mal à réveiller Hélène qui dort profondément.
Malgré notre petite étape prévue on ne traine pas trop.
Les premiers kilomètres sont plutôt cools mais en approchant de Soverato on se rend bien compte qu'on est dans une région montagneuse, malgré la proximité de la côte. C'est toujours aussi beau et on s'arrête souvent prendre des photos. On discute un peu avec des cyclistes du dimanche en vélo tout carbone, mais vraiment tout carbone, jusqu'au moyeu. D'ailleurs l'un d'eux à une caméra Co-pro sur le casque pour filmer leurs performances.
On prend rapidement de l'altitude dès la sortie de Soverato. Marie-Violaine nous a recommandé un itinéraire, donc on le suit mais on se rend compte que s'il est plus court que celui qu'on envisageait, il est aussi beaucoup plus raide. En l'espace de 5 km on passe de 100 à 400 mètres. Alors avec vos calculatrices vous vous dites que ça va c'est gérable... sauf qu'en fait il y a un peu de plat... et uniquement des côtés à 15% !!! On en bave, on en ch*e, on s'arrête tous les 200 mètres pour faire ralentir le palpitant. Heureusement il fait super beau et la vue est vraiment magnifique.
On se pose à Gagliato sur un banc avec vue. A la fin de notre pique-nique 2 gars bizarres viennent nous tenir le crachoir. On ne comprend absolument rien à ce qu'ils racontent mais l'un d'eux discourt tout seul et est instoppable. Il chante, il danse, il parle, il fait des gestes dans tous les sens. On a le temps de préparer et boire notre café avant qu'il finisse par s'arrêter et repartir comme ils étaient arrivés.
On arrive à bouquiner un peu en se caillant car à 400 mètres d'altitude avec le vent il fait déjà plus froid que le long de la côté. On repart donc pas trop tard. On ne sait pas trop combien de D+ il nous reste à parcourir donc on préfère avoir de la marge. Finalement on arrive un peu avant 16h à Santa Lucia, à côté de Chiaravalle, là où résident nos hôtes de ce soir. On ne trouve pas la maison et on se rabat donc sur la pizzeria du coin pour attendre... sauf qu'elle est fermée et n'ouvre qu'à 16h. On se pose dans le champ le plus proche pour bouquiner en regardant le soleil descendre sur l'horizon... et le froid mordant qui arrive avec. On rejoint la pizzeria, personne, tout est éteint mais l'heure d'ouverture est passée... et la porte ouverte. On rentre donc se mettre au chaud.
Au bout d'un moment une dame débarque, pas de café ou de thé pour se réchauffer, on prend donc... un coca qu'on sirote doucement. La dame reste à côté de nous, on essaye de discuter. Sa fille débarque ensuite, toujours pas un mot d'anglais pour se faire comprendre, mais avec le dictionnaire, l'espagnol et les gestes on se fait comprendre. Le mari, les enfants, le fils, le pizzaloio débarquent. Tout Chiaravalle va être au courant de notre arrivée :-) On discute avec tout le monde, on explique notre périple, comme toujours personne ne comprend pourquoi on fait ça mais on a l'habitude.
Marie-Violaine débarque et nous rejoignons sa maison à 200 mètres. La douche est un vrai bonheur. On papote tranquillement et on profite de la soirée. Son mari Francesco rentre du travail pendant qu'elle prépare le diner, des pâtes au thon et oignons et une salade de fenouil et d'oranges. Le fenouil c'est vraiment le légume du coin et du moment, les champs en sont remplis, les étals aussi.
On discute justement longuement de la Calabre et de l'Italie plus généralement et une fois de plus on adore passer un tel moment qui vient confirmer ou au contraire infirmer certaines choses que nous avions ressenties.
Exemples :
- oui "l'italien" est bien bruyant et parle fort. Ca n'est pas un cliché, c'est la réalité. Marie-Violaine nous confie d'ailleurs que quand elle parle italien elle parle pas mal de décibels plus fort que lorsqu'elle s'exprime en français. Ca fait partie de la manière de vivre.
- la Calabre est une région magnifique, les paysages qu'on a pu découvrir nous ont vraiment plu, et du coup on a l'impression d'une zone assez riche... ce qui est totalement faux. Visiblement c'est la partie pauvre et surtout délaissée de l'Italie. Loin de tout, montagneuse, pas de grosse ville, infrastructures routières limitées, absence de l'état... du coup s'en suit un exode massif des jeunes, des maisons vides (mais comme partout des prix qui ont du mal à baisser)... bref entre ce qu'on perçoit à première vue et la réalité de la vie dans la région il y a un fossé.
- l'Italie est bien comme la Grèce dans une période de troubles, crise bien sûr mais aussi le flottement dû au gouvernement de transition, la corruption... Fred, rencontré près de Bari nous avait déjà dressé un tableau peu réjouissant, et nous avons la confirmation ce soir que tout ça est bien réalité.
Vers minuit nous rejoignons notre canapé-lit, devant la cheminée, ça change du duvet et de la tente.


276è jour : Santa Lucia (Chiaravalle)

13 janvier 2012

0 km, 11191 km au total

Réveil très tranquille ce matin, nous laissons Francesco et Marie-Violaine (F&MV) se préparer et partir travailler avant d'émerger réellement de notre côté. Nous prévoyons une matinée dans la maison pour gérer un peu les trucs en attente. On a reçu la moitié de nos colis, on espère que le reste arrivera aujourd'hui sinon ça va être compliqué. On peut donc quand même réparer la sacoche, ouf. On traite nos photos, encode nos vidéos. Pas d'internet ici car c'est très très paumé et leur abonnement internet a été résilié par Vodafone... parce qu'ils n'arrivaient pas à amener le téléphone. Oui ça a l'air compliqué, mais venant d'un opérateur/fournisseur d'accès il ne faut jamais s'étonner de rien. On verra si cet après-midi on peut trouver une connexion au travail de F&MV. Ils travaillent ensemble dans une société "familiale améliorée". Les parents de Francesco vendaient des produits de construction, notamment du ciment et Francesco a inventé et breveté une machine pour faire des mortiers/enduits à échelle "humaine". En gros normalement ça se fait dans une énorme usine, mais lui à trouvé un moyen de réduire ça a une surface bien plus petite, ce qui permet à des petites sociétés un peu partout dans le monde de faire leur propre enduits. Les machines sont visiblement très modernes avec une gestion électronique à distance via internet.
On tente une nouvelle réparation de notre poche à eau... vu qu'on n'en a pas de nouvelle !
MV rentre déjeuner. Ensuite direction la Poste de Chiaravalle pour essayer de retrouver l'un de nos colis toujours pas arrivé. Manque de chance ça ferme à 13h et ne réouvre pas de la journée.
L'après-midi nous allons à Personal Factory, la société de F&MV. On visite et en apprend un peu plus sur le procédé. La machine est entièrement fabriquée ici (et pas en Chine) et le gros de l'activité reste ensuite le consommable. Visiblement Francesco est un fin marketeux et s'inspire du modèle "imprimantes jet d'encre ou Nespresso" : vendre des machines à prix serré qui ne fonctionnent ensuite qu'avec les produits de la société. Code barre pour scanner les produits "pour s'assurer de ne pas se tromper"... mais qui n'accepte que les produits prévus pour :-) En tout cas la petite entreprise semble bien fonctionner, c'est cool.
Nous profitons de l'imac 27 pouces de MV pour mettre à jour un peu nos sites, répondre à des emails, repasser des commandes sur le net, estimer des kilomètres pour les prochaines villes, contacter des warmshoweriens... nous montrons aussi quelques photos et découvrons celles du voyage de noce de nos hôtes en... Birmanie.
Direction ensuite une pizzeria où nous dégustons... une pizza. C'est notre première en Italie. Très bonne !
Retour ensuite à la maison pour finir la soirée avec un tisane autour de la cheminée, nous passons un excellent moment. Nous avons prévu de repartir demain, on espère avoir récupéré notre paquet avant mais ça n'est pas gagné :-(

277è jour : Santa Lucia (Chiaravalle)

14 janvier 2012

0 km, 11191 km au total

Ce matin il fait un temps pourri et on est un peu à la bourre dans nos préparatifs mais on s'active et on se motive pour partir. Hélène finit les préparatifs pendant que je vais avec MV à la Poste. Malheureusement pas de trace de notre colis. Snif. On espère qu'il finira par arriver et MV essaiera alors de nous le transmettre à une future adresse où nous pourrions être d'ici quelques temps. On part du coup faire quelques courses pour avoir de quoi manger pour demain dimanche.
Retour à la maison, dernière douche avant le départ... et vu le temps vraiment mauvais + la météo qui annonce beau demain + la proposition de MV de rester une journée de plus = on stoppe nos bagages et décide de rester et de partir demain matin.
Francesco rentre à la maison après une expédition de 24h à Rome où il a participé à une émission de sciences genre "c'est pas sorcier pour les mamies" (sic MV) pour présenter des réactions chimiques.
Il prépare les Vermicelli (on a toujours du mal à comprendre les noms des pâtes qui ont tendance à parfois être différentes pour ce qui nous semble la même chose), donc là c'est des spaghettis à fort diamètre, tomates cocktail et oignons rouges. Excellent. On en profite justement pour approfondir notre culture de l'Italie, via l'alimentation bien sûr mais aussi les autres clichés du type mafia, famille, noms typiques... Et oui Luigi, Francesco, Antonio, ... c'est pas un mythe.
On passe tranquillement l'après-midi près de la cheminée à discuter de nos projets communs de maisons. Eux aussi envisagent de construire la maison de leur rêve mais ils en sont à un stade bien plus avancé que nous : terrain en cours de négociation, plans bien réfléchis, budget et financement plus cohérent... nous on erre toujours profondément dans nos projets une fois revenus en France : leur ordre, leur logique, leur faisabilité, leur crédibilité... autant être clairs, on a approfondi depuis plusieurs mois un gros paquet d'options mais concrètement on n'a toujours rien de sérieux à vous raconter. Beaucoup de choses sont toujours de l'ordre du rêve et leur application à la réalité est un problème quelque peu insoluble. Temps, travail, argent, famille, localisation... on nage toujours autant.
MV partie acheter des bottes qui ne prennent pas l'eau revient, Francesco qui est parti travailler un peu revient également.
Nous passons une soirée toujours très agréable, autour d'un nouveau plat de pâtes et de légumes.

278è jour : Santa Lucia (Chiaravalle) - Pizzo

15 janvier 2012

57,6 km, 11249 km au total

Ce matin réveil un peu plus cohérent, météo ok, et préparatifs rapides. Après un petit dej et les derniers rangements nous sommes prêts à partir vers 10h. Nos hôtes se réveillent tout juste, nous leur souhaitons au revoir et... reprenons la route. Nouveau moment difficile, on a passé 2 jours et 3 nuits très agréables en leur compagnie, des moments très tranquilles et d'autres très instructifs, bref un excellent équilibre. On espère que le paquet de la mère d'LN (et celui de Mathieu qui nous a envoyé une nouvelle bidouille électronique pour optimiser le chargement de l'iphone sur la dynamo - oui encore) arriveront et pourrons nous être transmis un peu plus loin sur le chemin.
Le retour sur la route signifie d'abord reprendre la montée. Cette fois on suit la route "principale" qui oscilles et tourne au gré du paysage mais monte relativement doucement. Nous passons ainsi notre nouveau record d'altitude (un peu plus de 750 mètres) sans trop souffrir. Le genou gauche s'est un peu reposé et ne se plaint pas trop, ouf.
Le paysage est terrible ce matin car comme il a plu copieusement hier... il a aussi neigé en altitude. Il y a un peu de blanc sur le bord de la route et sur les arbres, forêts, champs au loin. Avec le soleil c'est splendide... Le côté moins rigolo c'est que ce même soleil fait fondre les flocons accumulés sur les branches... et certes ça nous tombe sur la tête, mais ça trempe aussi copieusement la route. En montée à 8 km/h ça n'est pas trop un problème mais lorsque nous arrivons au sommet et entamons la descente de l'autre versant à 40 ou 50 km/h, sans garde-boue ça éclabousse partout. Comme il fait bien froid aussi, qu'il y a du vent et que la descente en rajoute une couche... nous rajoutons également toutes les nôtres : polaire, coupe-vent, pantalon de pluie, surchaussures, gants épais, moufles étanches... la totale... et on apprécie.
Une fois une altitude plus clémente et moins humide retrouvée il est temps d'envisager le traditionnel pique-nique puis de repartir en direction de Pizzo. Un petit crochet de 6 km pour aller voir une petite ville sur un rocher, conseillée par F&MV... pour aller y manger une glace, spécialité du coin.
Avant de pouvoir rejoindre la ville il faut malheureusement remonter d'une grosse centaine de mètres, mais la vue mérite la côte. On redescend un peu et trouve la petite place officielle des glaciers. On profite de la vue, du soleil qui descend sur l'horizon et d'une "tartufo" : boule de crème glacée moulée main, aux 2 chocolats, avec un cœur de chocolat coulant et recouverte de cacao. Très bon même si mi-janvier sur une terrasse de café c'est un peu étrange comme sensation. Hélène s'en tiendra au thé au citron. Le temps passe très vite, tout juste le temps de profiter du wifi du café pour commander une paire de chaussettes étanches sur internet... et nous sommes bien en retard sur la recherche de bivouac. On reprend donc le tandem pour sortir de la ville et commencer les recherches. On a fait un peu de repérage "à l'aller" et en regardant depuis le haut de la ville mais entre ce qu'on observe de loin et la réalité c'est toujours un peu compliqué. Après quelques imbroglios de petits chemins sans grandes options nous aboutissons sur la plage. C'est calme, pas d'accès proche, peu de risques d'être dérangés et de toute façon le soleil est déjà sous l'horizon et ne nous laisse plus trop d'autre choix que d'enfoncer les sardines dans le sable. La vue est bien entendu splendide et "imprenable", seuls les déchets rejetés par la mer, le vent, et les gens sans gène ternissent un peu le paysage.
Le vent est bien frais et la température va encore baisser, on se réfugie donc rapidement dans la tente.

279è jour : Pizzo - Campo di Mare

16 janvier 2012

60,3 km, 11309 km au total

Longeage de mer, contournement de massif montagneux et bivouac de nouveau près de la mer. Une belle journée sans point exceptionnel ou marquant, mais une journée agréable... surtout quand en ce lundi les autres sont au boulot...

280è jour : Campo di Mare - Citadella del Capo

17 janvier 2012

52,7 km, 11362 km au total

Nouvelle heure de réveil - d'un presque commun accord avec Hélène (hum hum) - 5h30 (contre 5h50 auparavant). Alors vous vous dites qu'on est dingues, fous, stupides de se lever si tôt alors qu'on est "en vacances", vous avez peut-être un peu raison mais il faut replacer les choses dans leur contexte. Nous avons le même fuseau horaire que les français, mais nous avons probablement 2h de décalage niveau soleil par rapport aux personnes à Nantes ou à Bordeaux. Bref si on retire nos montres et qu'on ne se fie qu'au soleil quand il est 7h30 chez vous il est 5h30 ici... ce qui rend notre heure de réveil pas si idiote que ça. L'idée reste toujours d'essayer de profiter au maximum des heures de soleil. On se lève donc de nuit, prend le petit dej avec la luminosité qui se lève doucement et on plie la tente avec le soleil levant.
N'empêche qu'à 5h30 il ne faut pas s'attendre à une Hélène fraiche et dispose :-)
La route de ce matin s'annonce sous le signe du relief. En effet on longe toujours la côte mais ça n'empêche pas les falaises de s'approcher très près de la mer. Les routes font du mieux qu'elles peuvent, parfois les tunnels nous aident un peu mais on peine bien comme il faut. Malgré le soleil il fait très frais et le vent - pas à notre avantage - ne nous aide pas. On vit cet espèce d'état de grâce du macaroni cramé et cru à l'intérieur. Appliqué au vélo ça donne "on transpire en montant tout en étant glacés par le vent".
On enchaîne les contournements de bleds sans rien voir qui ressemble à un supermarché. A Paola on se décide pour redescendre dans le centre, un peu plus près de la côte. On se fait quelques belles épingles à cheveux en écoutant la roue arrière faire "wouf-wouf-wouf" à chaque tour : ça y est le pneu a lui aussi atteint son état de grâce : il est en train de se déchirer au niveau des flancs, comme son prédécesseur en Pologne. Le timing est quand même ultra parfait, ça fait à peine 3 jours qu'on roule avec les pneus neufs dans les sacoches, je voulais qu'on use les autres jusqu'à leur mort, ben voilà, le pneu arrière il ne lui reste plus que quelques heures de vie. On aurait été beaucoup moins zen si on avait pas les neufs à portée de main. Ca devrait néanmoins tenir jusqu'à ce soir où je les changerai une fois le vélo déchargé.
Après moults méandres et intersections, alors que nous allons presque sortir de la ville sans avoir trouvé notre bonheur, nous tombons sur un Spar. Cool une nouvelle enseigne pour nous. Bon c'est grand mais pas folichon, néanmoins assez cher mais au moins on a de quoi manger pour le pique-nique. Nous prendrons ce dernier sur la plage quelques kilomètres plus loin. Il est midi passé, ça gargouille à tous les étages du tandem :)
Hélène s'empaffe après quelques pages de lecture, il faut dire que le relief nous calme bien comme il faut.
Nous reprenons néanmoins histoire de faire quelques kilomètres avant de bivouaquer et pour avoir le temps de bricoler avant le coucher du soleil. On essaye quelques routes plus proches de la mer que la route principale histoire de toujours limiter le relief mais il faut toujours avoir un œil sur le GPS "à 5 km" car pas mal de petites routes finissent en cul de sac, ou plus simplement par rejoindre la route principale après une bonne montée bien raide.
L'après-midi passe et on ne trouve rien de plat pour envisager de bivouaquer. Pire, on entame une montée de plusieurs kilomètres. Absolument aucune possibilité de quitter la route pour quoi que ce soit... hormis accepter de redescendre à pic 75 mètres pour se retrouver sur la plage, totalement à découvert. On poursuit donc, plutôt fatigués, le moteur arrière du tandem peine même s'il continue de forcer, celui de l'avant n'est guère mieux à pédaler d'une jambe pour limiter les efforts du genou gauche. Après une ou deux tentatives infructueuses nous trouvons un vague champ d'olivier sans clôture. C'est loin d'être plat, c'est caillouteux et un peu visible mais au moins on peut enfin s'arrêter. Il est 16h30, le soleil se couche dans moins d'une demi-heure, donc trop tard pour le changement du pneu. Le froid tombe aussi à une vitesse folle. Ce midi à l'abri du vent et en plein soleil le pique-nique était vraiment super agréable, presque pas besoin de se couvrir. Ce soir à 17h, dehors c'est limite tenable malgré nos vêtements chauds. Peut-être que la fatigue n'y est pas pour rien non plus.
Dans nos emails ces derniers jours, une info assez sympa : on va avoir de la visite à Naples. Alors c'est "une surprise" mais comme il y a un minimum besoin d'organisation on arrive à être au courant de certaines choses. On essaye surtout d'analyser des petits détails dans les emails afin de savoir "qui" sera là. Il y a des trucs déroutants, des possibilités, des trucs logiques ou non, peut-être aussi de la désinformation pour brouiller nos pistes, allez savoir ! Enfin bref ça nous occupe bien de chercher et on a hâte d'être à lundi prochain ! Ca nous fait aussi une adresse postale pour peut-être récupérer des colis. Ca y est celui de Mathieu est arrivé à Chiaravalle donc il a une chance d'être transmis à Naples dans les temps, pour celui de la mère d'Hélène toujours pas de nouvelles. On imagine bien son arrivée à Chiaravalle, sa transmission à Naples et son arrivée à Naples après qu'on soit reparti... mais croisons les doigts et espérons que ça se déroule un peu mieux quand même.

281è jour : Citadella del Capo - Petrosa

18 janvier 2012

36,5 km, 11398 km au total
Encore une journée magnifique qui s'annonce même si Hélène est assez patraque niveau ventre. On s'octroie une grasse matinée pour qu'elle se repose un peu avant de repartir. Nous longeons toujours la côte et on percute à un moment qu'on a une adresse à laquelle on devait passer pour une pâtisserie réputée... sauf que c'était il y a 2 jours et qu'on a totalement zappé ! Etrange, d'habitude quand il s'agit de douceurs sucrées aucun de nous deux n'oublie !
En milieu de matinée on passe devant une petite boutique de bricolage, on se dit que ça serait une bonne idée d'aller voir pour du gaz sauf qu'on n'est pas décidés (allez savoir pourquoi), on continue un peu et on tombe nez-à-nez avec un camion de livraison de bouteilles de gaz (les grosses de 13 kg) qui est devant une petite boutique (et non pas une station essence), on se dit qu'on a donc de bonnes chances de trouver notre bonheur et si ça n'est pas le cas le propriétaire du camion devrait pouvoir nous indiquer où trouver. En effet pas de bouteilles à notre format à se mettre sous la dent, mais une indication : à 500 mètres là-bas, c'est tout près, juste après la station essence il y a une boutique de matériaux de construction, vous trouverez. Bon ça veut dire qu'il faut revenir sur nos pas, 500 mètres ça coïncide avec le magasin de bricolage qu'on a vu... on a un peu la haine mais bon, 500 mètres ça va.
Nous allons donc dans la boutique, qui bizarrement n'a pas le nom qu'on m'a donné. Pas de bouteilles de gaz mais on me précise que le nom de société que je cherche c'est bien comme on m'a indiqué, mais juste un peu plus loin.
2 BORNES ! Encore une fois on constate que les habitués de la voiture sont de très mauvais calculateurs de distances. Pour le relief c'est simple on ne fait jamais confiance à ce qu'on nous dit "ah vous verrez c'est plat" (mouhaha), mais pour les distances ça y est on ne croira plus personne non plus. Faudrait pas qu'ils bosse à la NASA notre monsieur, parce qu'avec une marge d'erreur de "fois 4" comment dire... il y a de quoi être recalé aux examens.
Enfin au bout des 2 BORNES on trouve et la boutique et la bouteille de gaz. Encore une Camping Gaz CV300 comme on aime mais qui doit être dans les cartons depuis plusieurs années à en voir son état de rouille avancée. Espérons juste que la valve fonctionne encore :)
2 nouvelles BORNES dans le sens inverses (merci les 4 kilomètres de rallongis) et nous voilà repartis "alors on en était où déjà ?". Le route plutôt plate ce matin nous amène pique-niquer sur la plage. On trouve une petite cabane type "bar d'été" qui nous offre un abri du vent très appréciable. Tellement qu'on crève sérieusement de chaud. Le soleil tape, on a retiré toutes les épaisseurs superflues. Hélène grignote mais n'est pas d'une forme exceptionnelle. Moi j'avale mes sandwiches tout seul.
L'après-midi nous rejoue le même programme qu'hier : avec le soleil qui descend la route monte. Et monte sévère.
On s'arrête prendre notre souffle quelques minutes sur un petit parking (enfin un truc genre élargissement de voie de 20 mètres de long) et on voit arriver 2 cyclotouristes en sens inverse. Des français ! Yann et Marie, partis en septembre de Savoie. On papote tranquillement jusqu'au moment où je commence à me sentir mal. Nausées, vertiges, crampes d'estomac... mince serait-je enceint ? Grand moment de solitude où tu es sur un parking en bitume, dégueulasse comme toujours (morceaux de verre), donc pas vraiment l'endroit où s'allonger. Le deuxième effet kiss-cool c'est le besoin de toilettes... mouhaha, j'ai dit qu'on était sur un parking. Pas vraiment de verdure ou d'endroit où se planquer. Un vis-à-vis parfait avec les ouvriers du chantier d'à côté... Là tu prends sur toi, tu t'assois et tu respires calmement.
Au bout d'une dizaine de minutes les spasmes passent. Hélène discute tranquillement avec Marie et Yann pendant que j'essaye de reprendre le dessus.
Comme le soleil descend, que l'endroit n'est pas bivouaquable et qu'il va probablement encore falloir qu'on roule pour se trouver un endroit plat où planter la tente on ne traine pas trop. Pas de bivouac commun ce soir, tant pis.
Reprendre la montée alors que tu rêves de t'allonger dans ton lit, voilà ce qui fait notre courage. Là, oui, on avoue que ça ne fait pas partie des super moments de bonheur intense. On se rassure en se disant que de toute façon on n'a plus de lit (merci leboncoin).
On peine bien comme il faut et au bout de quelques micro kilomètres on se trouve un genre de petite place herbeuse à côté de maisons de vacances inhabitées. Un peu plus loin entre 2 lacets de route des buissons, végétation indispensable pour les périodes de transit accéléré. Comme on maitrise la répartition des tâches, Hélène se lance dans le montage de la tente pendant que je fais faire une analyse détaillée des fameux buissons. La vue est splendide, c'est vraiment un endroit magique... il faudrait juste être dans l'état d'esprit pour en profiter.
Quand je revient pas vraiment mieux, je trouve Hélène en grande discussion avec une dame qui balade son chien. Elle veut qu'on aille demander au gardien du village (car visiblement c'est un truc privé sécurisé) l'autorisation. Nouvelle répartition de tâches, là encore c'est Hélène qui s'y colle. Autant être honnête, être à deux dans des moments comme ça c'est quand même génial. Une petite pensée pour le cyclotouriste solitaire qui a déjà à moitié monté la tente alors qu'il est à 2 doigts de tomber dans les pommes ou plutôt en recherche de toilettes et qui doit aller voir le gardien pour papoter... hum, pas cool.
Donc bref Hélène revient avec... l'autorisation d'attendre que le gardien vienne voir si ça peut le faire ou non. On attend 5 minutes, il arrive en voiture (LN y était à pied, c'était pas loin)... et ouf, c'est ok. Il revient d'ailleurs un peu après pour nous donner... une bouteille de vin. C'est adorable mais pas vraiment le genre de choses qu'on a envie d'ingérer. Hélène est un peu mieux que moi mais plutôt au "bouillon de poule" qu'à l'alcool !
Fin du montage de tente, nouvelle visite des buissons et mode dodo immédiat. C'est l'une des rares fois où le programme est chamboulé et on s'en fout. Diner ? heu... on verra. On essaye déjà de se réchauffer, Hélène s'en sort mieux car elle s'est changée, moi je grelotte dans mes fringues de vélo humides de sueur. Hélène écrase mon matelas en essayant d'attraper la sacoche de nourriture, elle commence à grignoter des céréales... mais l'impact de l'onde de l'écrasement matelesque se propage dans mon corps, mes intestins, mon estomac... et quelques secondes plus tard mon déjeuner revoit le jour, ou du moins ce qu'il en reste vu que désormais le soleil est passé derrière l'horizon. Je profite de l'effet "ah ça soulage" pour me changer, prendre quelques médocs et rejoindre bien vite le sac de couchage bien chaud pendant qu'Hélène se dévoue pour faire visiter une poubelle située à une cinquantaine de mètres à mon déjeuner. Après une seconde réexpédition postale quelques dizaines de minutes plus tard et une sortie nocturne histoire de revisiter d'un peu plus près les buissons je finis par trouver un peu de sommeil.

282è jour : Petrosa - Santa Maria Li Piani

19 janvier 2012

49,3 km, 11448 km au total

Après cette nuit charmante, malgré l'absence de réveil c'est quelques coups de tronçonneuse qui nous sortent du lit vers 7h30. Un peu court mais on fera avec. Comme la tronçonneuse s'arrête très vite Hélène flippe un peu "tu crois qu'ils ont visité les buissons eux aussi et n'ont pas trop apprécié ?" :-) Non, tout va bien.
Ce matin petit dej : quelques grammes de pétales de maïs sucrés et une infusion à la menthe (avec un reste de miel grec). Ca va faire des calories pour les montées ça ! Alors que je finis de plier la tente pendant qu'Hélène est partie dire au revoir aux buissons, le gardien vient voir si tout va bien... et il nous apporte : du café et des pâtisseries. Là encore l'intention est vraiment très gentille mais un peu décalée. J'accepte en souriant. Le café ça va pas être possible, les pâtisseries on verra plus tard si c'est ingérable ou non.
On reprend donc notre montée. L'endroit ne se prête pas vraiment à passer 2 nuits (plus de place dans les buissons surtout :-) et côté timing en fait on est plus justes que ce qu'on avait imaginé. Si on veut être à Naples lundi soir pour rencontrer notre "surprise" on est très très short en temps contrairement à ce qu'on avait imaginé.
Donc le programme c'est de rouler, doucement, de s'arrêter autant qu'il faudra, mais d'avancer quand même. On commence d'ailleurs par un premier arrête dans une station service acheter du coca et de l'eau minérale. On n'a pas trop d'idée de l'origine de notre gastro, pour ma part ça ressemble plus à une intoxication alimentaire, mais due à quoi ? Tout aliment est du coup un peu suspicieux, d'autant plus que j'ai remis au jour hier soir des aliments antérieurs à ceux du pique-nique... pas très rassurant.
Après une belle montée on redescend quand même au niveau de la mer à Praia a Mare. On longe pendant un moment, c'est agréable, même si cette station balnéaire est bien morte en cette saison.
La suite est beaucoup moins drôle. Certes on continue à longer, mais cette fois pas de "baie" ou de grande plage, c'est de la montagne avec la route taillée dans la roche. Pas plat pour un sou et totalement anti vélo. On s'insurge régulièrement contre la personne qui a osé faire une descente de 50 mètres de dénivelée pour l'enchaîner avec la remontée équivalente alors qu'il aurait été tout aussi possible de tailler la route différemment et ainsi limiter le relief.
On souffre tous les deux, bien copieusement. Le paysage est absolument magnifique mais je crois que pour la première fois depuis le début du voyage on est tous les deux à penser "on serait mieux à la maison". Je rassure Hélène en lui disant que comme pour le lit "on n'a pas de maison" mais oui, il faut l'avouer, c'est dur. On s'arrête régulièrement. On reprend notre souffle, on laisse passer des crampes d'estomac. Le vélo agonise... ben ouais c'est pas hier qu'on a eu le temps de changer le pneu. A l'arrière ça empire, dès qu'on passe les 20 km/h (quand ça descend) le vélo entre en résonance, c'est insupportable et Hélène me dit "heu ça touche aussi le cadre à chaque tour de roue". C'est pas ça qui va améliorer notre facilité de roulage. Déjà qu'on ne peut pas trop gonfler pour ne pas exploser définitivement le pneu...
L'autre aspect démoralisant de ce paysage c'est qu'on est coincés : à droite une rambarde avec une falaise qui descend à pic, et à gauche la roche verticale. Tous les quelques kilomètres il y a un vague élargissement pour stationner une voiture en panne mais c'est à peu près tout. A l'échelle du vélo qui grimpe l'espace entre ces "pauses" est énorme et c'est vraiment pas l'endroit où tu as envie de te poser pour pique-niquer. Alors bon c'est pas qu'on ait vraiment envie de manger, mais on aimerait quand même s'allonger un moment pour se reposer et aussi faire sécher notre tente qui était humide ce matin.
On continue et ce n'est qu'après encore pas mal de montées et de dizaines de minutes qu'on arrive enfin à trouver un vague bout de terrain un peu plus large et plus confortable que le bitume. On s'écroule tous les deux. Hélène se fait un sandwich en regardant le reste de jambon d'hier de travers façon "roulette russe, je le tente ou pas ?". Moi je me cantonnerai au pain de mie fourré aux galettes Saint Michel et aux dragibus.
L'après-midi est exactement sous le même signe que la matinée, on arrive néanmoins à prendre un raccourci à un moment qui nous permet d'éviter de redescendre pour remonter. Merci le GPS. On continue à découvrir des endroits vraiment très beaux, très sauvages, sur une côte découpée, ciselée même, c'est vraiment exceptionnel. Mais vraiment à faire en voiture ! Même si la santé était meilleure je crois qu'on aurait peiné et crisé sur ce relief type Danemark : sur la carte ça oscille entre le niveau de la mer et trois fois rien, mais en pratique le fait de monter pour redescendre pour remonter c'est psychologiquement usant. En tout cas pour nous deux sur notre embarcation bien chargée.
La fin d'après-midi est un peu meilleure, puisqu'après s'est farcis une montée jusqu'à environ 200 mètres, ça redescend doucement jusqu'au niveau de la mer et Sapri. C'était un peu notre objectif de toute la journée : on aimerait bien y arriver mais quand tu vois que tu as peiné pendant ce qui te semble 3 kilomètres et 1 heure et que le panneau, et le GPS, et les cartes te disent que tu viens d'achever difficilement UN kilomètre, il y a de quoi être assez décontenancé. Bref on arrive donc à Sapri, ville très étrange peuplée de zombies qui errent. Ca nous fait très bizarre de voir plein de petits vieux à pied, juste en train de se balader. Au début on croit qu'il vont à un évènement particulier mais non car ils ne marche pas tous dans le même sens. Ils sont espacés, mais il y en a plein partout. On est en plein hiver, certains ont des sacs de courses, voir de boutiques plus chics, d'autres un sac à dos, étrange. Dans ces zones où la voiture est reine on est un peu déconcertés par ces gens à pied. C'est difficile à expliquer, il faut le vivre pour comprendre je pense, mais voilà, je l'ai écris quand même :)
Notre nouvel objectif est donc de trouver où dormir. Parce que Sapri c'est plat (enfin la partie proche de la mer) mais une nouvelle fois c'est le royaume de la propriété privée. On trouve quelques champs d'oliviers ou de citronniers bien accueillants mais inaccessibles. Quelques campings aussi, mais fermés, verrouillés, cadenassés.
On poursuit un peu, on sort de la ville où on a un espoir d'avoir une densité d'habitat plus faible et un relief pas encore redevenu trop méchant quand on tombe sur un camping où il y a une voiture. On tente, c'est officiellement fermé, en fait les proprios commencent tout juste à lancer les "travaux" pour la saison à venir, mais ils sont ok pour qu'on passe la nuit. Pas d'eau chaude ni d'électricité, mais on peut néanmoins poser notre tente gratuitement... et outre du wifi qui nous permet de découvrir une naissance (bienvenue à toi Léopold) il y a des toilettes !

283è jour : Santa Maria Li Piani - Palinuro

20 janvier 2012

41,1 km, 11489 km au total

Ce matin, comme prévu il fait un temps pourri. On fait quelques kilomètres en cherchant un supermarché ou ce qui s'en approche le plus car après on sait qu'on entame une traversée du désert. On a épluché les cartes et la vue "relief" de Google Maps et on va contourner un massif montagneux de la manière pas forcément logique vue du ciel, mais qui est censée préserver un peu nos maigres forces.
On ravitaille donc en choses "compatibles post gastro", moins de fibres que d'habitude quoi.
Ensuite on enchaîne par une belle erreur de navigation, merci l'atlas Michelin. Ca fait au moins la dix ou quinzième fois qu'on peste contre le manque de précision de cet atlas. La cartographie est pourtant au 1:200 000è, ce qui est presque luxe pour nous mais il y a des erreurs majeures, sachant qu'on a pourtant l'édition 2011. Bref ce matin la carte indiquait "passez la rivière, continuez encore un kilomètre et vous tomberez sur un joli trèfle qui vous permettra de prendre la belle route que vous souhaitez". Dans les faits c'est très différent, le trèfle étant 1 km avant la rivière... et pas du tout sur la route principale mais sur une autre. Bref on se retrouve un peu loin de ce qui était prévu. On sort Google Maps, on manque un peu de définition pour vérifier si les petites routes qu'on envisage pourront ou non rattraper notre route principale. On le tente, boum premier échec, la petite route passe dessous mais pas de moyen de prendre la route de notre désir. On poursuit car après un zigzag ça peut potentiellement le faire... la route se transforme en chemin... mauvais signe. On arrête un 4x4 en sens inverse et il nous confirme que là non plus ça ne va pas le faire. Bilan des courses, probablement 5 km inutiles, super car c'était en montée et sous la pluie. Il faut donc redescendre, revenir sur nos pas, retrouver le "trèfle magique" et emprunter la jolie route... qui se trouve interdite aux vélos. Rien à faire, ça n'est pas une autoroute, elle ne dessert pas grand chose, donc pas grand monde dessus, on la prend quand même. Pas envie de refaire 5 bornes en sens inverse.
Forcément et comme prévu, ça monte. On passe du niveau de la mer à un peu plus de 300 mètres en ligne quasi droite... et en trop peu de kilomètres. La météo est horrible, alternant entre la pluie battante et le micro rayon de soleil qui fait suffoquer sous les couches imperméables. On en ch*e, on en bave, c'est horrible. Hélène rêve de tout plaquer, mais on continue quand même.
On double une voiture (4x4) de gendarmerie couchée sur le côté avec 300 personnes pour faire la circulation autour, on ne sait pas trop ce qui s'est passé mais on imagine qu'il y en a un qui va se faire tirer les oreilles !
En haut des 300 mètres, trempés de sueur et sous la pluie on s'arrête à une station service. Car le fait d'arriver au sommet et d'avoir rejoint un genre de gorge étroite nous apporte la petite nouveauté : le vent glacé.
On abrite un peu le vélo et on rentre dans le petit bar de la station. Il ne fait pas vraiment chaud mais au moins c'est abrité. On s'offre un thé brûlant, on a même le droit au pot d'eau chaude pour l'allonger autant qu'on veut... on ira même redemander de l'eau afin de commencer un chouilla à se réchauffer.
Il est 13h et alors qu'Hélène me dit "on va peut-être rester un peu" et que je reviens juste avec quelques gâteaux et le pack de batterie pour brancher sur une prise électrique repérée le tenancier nous indique qu'il ferme pour aller déjeuner. Aie, pas cool, coup dur. Dehors c'est la tempête, il pleut à verses, le vent projette les gouttes à 45° et il faut qu'on reparte. Ouais un petit vendredi aprem plaqué derrière un ordi ça doit en tenter plus d'un par rapport à ce qu'on vit aujourd'hui.
Avec 3 gâteaux dans l'estomac on reprend donc la route, qui désormais descend, ce qui est certes une grande amélioration par rapport aux heures précédentes, mais est également synonyme de "rhaaaaaa ça caillllllleeeeuuuuuhhhhh". La pluie ressemble plus à de la grêle, on ne voit pas grand chose, mais au moins le tandem file droit, seules les bourrasques de vent nous font faire quelques écarts, mais les pneus neufs sont une avancée bien appréciable aujourd'hui.
Le paysage est une fois de plus majestueux. Il y a une gorge étroite, la rivière au fond et quelques élargissements bien verts où on planterait bien la tente... si une fois de plus tout n'était pas ultra grillagé, protégé.
Nous rejoignons donc la mer non sans une dernière petite colline pour finir de nous arracher les fesses et les genoux. De l'autre côté on voit un accès un peu sauvage (un micro chouilla sauvage mais ça nous ira), on décide donc de stopper les frais pour aujourd'hui et de planter la tente sous un pin accueillant. On profite même d'une accalmie pluviale pour monter au sec et faire un peu sécher les sacoches grâce au vent qui lui se maintient bien comme il faut. La mer est déchainée, on dirait plutôt l'Atlantique que la Méditerranée.
On se change, grignote un peu et s'empaffe alors que déjà la nuit tombe.
On estime de nouveau le kilométrage, c'est toujours faisable d'être à Naples lundi soir mais on commence à envisager aussi sérieusement la possibilité de s'avancer un peu en train. Ras le c*l des montagnes. Ce coin est hostile aux cyclistes, ou alors on n'a pas la "configuration minimale recommandée" au niveau des jambes.
Et aujourd'hui pour ceux qui suivent ça fait 10 mois qu'on a quitté Paris ! Je crois que c'est pas le bon jour pour faire un bilan, on va y réfléchir et en reparler par la suite, il vaut mieux :)

284è jour : Palinuro - au milieu de nulle part

21 janvier 2012

51,6 km, 11540 km au total

La mer déchainée n'a pas facilité le sommeil mais au réveil la météo s'est nettement améliorée. On repart donc avec l'humeur un peu au dessus des chaussettes mais le physique toujours un peu fatigué. Pas de bol ça commence par une belle montée, qui dure, dure... avant d'arriver sur une descente à pic sur une route dans un état improbable. On freine des 4 fers en voyant en face qu'il faudra tout remonter. Le moral en prend un coup. La remontée est heureusement un peu plus douce et le paysage toujours aussi beau. Ca n'en finit pas de monter. On voit la ville dans laquelle on doit descendre ensuite, on voit qu'il n'y a pas de raison logique à la poursuite de la montée, mais c'est comme ça, pas d'alternative. C'est rude.
On entame ensuite le repassage au niveau de la mer. 2 heures principalement en montée ce matin et 6 minutes de descente, en freinant fort à cause des virages. Déprimant.
Nous entamons ensuite la partie qui s'annonce plus plaisante. Il y a une vallée un peu plus large avec une belle route au fond. Les premiers kilomètres sont très plaisants, certes en raison de l'horizontalité de la route mais également de l'élargissement du champ de vision. Au bout de plusieurs jours passés sur ces routes dont 180° sont bouchés par la roche et une visibilité qui ne va que jusqu'au prochain virage, avoir une vue qui s'étend au delà de 100 mètres c'est bien agréable.
On se pose sur la place d'une petite ville pour déjeuner sur un banc avant de reprendre la route nationale car on sait s'expérience qu'ensuite trouver un endroit pour se poser qui soit mieux qu'un élargissement de 3 mètres de large et 20 mètres de long sera impossible.
L'expérience n'est pas super agréable. On est dans une ville relativement moderne mais on se croirait en Roumanie. Les gens nous zieutent, s'approchent et figent mais sans jamais prononcer un mot ou entamer le discussion, ils rigolent de loin... C'est pas la première fois et ça ne nous donne pas une super impression du pays.
Après un peu de squat de wifi et de lecture nous prenons donc notre SP430, royal, c'est plat, toujours à une seule voie dans chaque sens, limité à 80 km/h et avec une large bande d'arrêt d'urgence. Une voiture de police passe en sens inverse et on a tous les deux un mauvais pressentiment. Quelques minutes plus tard on se fait doubler par une voiture de police... est-ce la même ? En tout cas la coïncidence commence à être troublante... Quelques minutes plus tard une voiture de police est garée sur un parking et 2 policiers nous font signe de nous arrêter. Merde on est grillés. On a bien vu le panneau interdit aux vélos mais c'est vraiment abusif. On serait en France j'utiliserai la suggestion que mon père m'a faite un jour (c'était son métier la voirie) "La signalisation est contraire au code de la route qui est censé définir les règles logiques de circulation des différents véhicules". Mais en Italie avec des policiers qui parlent 3 mots d'Anglais c'est pas gagné. Bref on joue les étonnés "mais c'est pas une autoroute !". Hélène montre la carte. Rien à faire ils nous font sortir par la bretelle juste derrière avec comme consigne de prendre une route... qui ne nous arrange pas du tout ! On s'estime déjà heureux de ne pas se prendre de prune car comme dit Hélène "en cette période de crise, tout argent est bon à prendre" mais on est dégoutés. Une fois notre escorte repartie on fait le point. La carte papier est toujours aussi imprécise et Google Maps nous propose quelques alternatives pour limiter le relief, mais en gros au lieu de faire une jolie montée de 200 mètres, passer par un tunnel et redescendre, on va devoir se farcir une multitude de montées/descentes, en zigzag avec peut-être 1000 mètres de D+ au total. On rumine... mais on ne sait pas encore la suite.
On se lance donc comme une fleur dans notre projet "suivons la route indiquée sur le GPS". Au bout de quelques kilomètres on constate que... la route à gauche là, oui celle qu'on doit prendre, ben elle n'existe pas vraiment. C'est un chemin boueux, caillouteux, avec des flaques d'eau hallucinantes (ben oui il a fait un temps pourri hier) et surtout avec aucune garantie que ça finisse par aboutir réellement quelque part.
On le tente quand même. A plusieurs reprises on croit que c'est finit, que le portail là en face indique la fin de l'expérience, mais non en fait ça contourne, le chemin se rétrécit, mais ça passe. On monte des pentes de caillasse à 25% en poussant le vélo. On passe à 0,01 km/h des chemins de 30 cm de large, en descente boueuse avec des ronces partout et ainsi de suite. Toujours confiant, toujours GPS sous le nez. On aboutit sur un élargissement, un peu de plat et quelques minutes plus tard une route qui passe près d'un joli barrage. Ca remonte de l'autre côté de la rivière (qu'on traverse via un gué, sympa) et on retrouve un peu de ce qui ressemble à de la civilisation. L'endroit est plutôt chouette et bien entretenu, on ne sait pas trop si c'est une caserne militaire, une usine de production d'eau ou un camp de vacances vide... bon c'est samedi il n'y a personne mais ça ne nous alarme pas.
Ce qui nous alarme par contre c'est d'arriver nez à nez avec un portail massif... fermé. La bonne blague ! En gros on est bien à l'intérieur d'un genre de village vacances, mais on est coincés à l'intérieur parce qu'on aurait jamais dû y rentrer !
La bonne nouvelle c'est que de l'autre côté il y a une voiture et quelques personnes qui discutent... on ne sait pas ce qu'elles font, elles ne percutent pas en nous voyant, mais on les interpelle en essayant de faire comprendre qu'on veut sortir. Un des hommes nous fait comprendre qu'il connait quelqu'un, qu'il va l'appeler pour ouvrir le portail. Interphone, attente, quelques minutes plus tard une voiture débarque, un mec ouvre la fenêtre et commence à raconter on ne sait pas quoi. Comme d'habitude, pas un mot d'anglais. On fait des gestes basiques genre "vous ouvrir porte". Mais il continue à nous parler en italien à toute vitesse. Encore une fois on a du mal à comprendre le principe : une fois que tu as assimilé que la personne en face de toi ne comprend pas ta langue tu essayes autant que possible de faire des gestes, de parler lentement, éventuellement tu sors un bloc notes et tu fais des dessins... mais là non, il s'entête. Hélène s'essaye en Italespagnol. Le mec joue le flic (on a déjà eu notre dose aujourd'hui) et nous engueule du genre "on n'a pas à être ici". On explique que c'était ouvert, qu'on est arrivé par la forêt. Il nous répond que c'est pas possible, que c'est pas ouvert. On insiste. Il ne veut rien savoir. On poireaute, "mais tu vas l'ouvrir ta porte connard !". On a l'impression qu'il peut ouvrir mais qu'il ne veut pas. Hélène lui montre sur l'iphone par où on est arrivés, et aussi par quelle route on veut poursuivre, et donc que c'est logique de passer par ici.
On comprend finalement qu'on va devoir ressortir par où on est arrivé. No way, impossible, jamais. Je passe le tandem par dessus la grille devant lui s'il ne veut pas appuyer sur son bouton sacré de Maître du Temple, mais hors de question de revenir par ces petits chemins pourris.
Au loin la SP430 nous nargue toujours de son tracé délicat qui épouse les méandres de la vallée. Les voitures passent doucement, le soleil descend au même rythme, on se demande pourquoi on ne l'a pas récupérée à l'entrée suivant celle où on s'est fait éjecter...
Connard nous fait signe de reculer... veut-il vraiment qu'on rebrousse chemin ? Non c'est juste qu'il veut de la marge pour l'ouverture du Magnifique. Clic bouton, bzzzzzz, et hop "au revoir" on se barre.
On prend à droite, comme on a montré à Connard - qui n'a rien dit - on se prend une belle montée, et oh pour en rajouter une couche, la route à gauche sur laquelle on comptait... n'existe pas. Mais alors vraiment pas du tout. On fait demi-tour, repasse devant la grille, resalue Connard au passage (merci de n'avoir rien dit sur l'inexistence de la route) et on prend donc l'autre direction possible. C'était une alternative mais qui nous plaisait beaucoup moins car la route, au lieu de faire des méandres pour monter les 300 mètres de dénivelées qui nous attendent, va tout droit, hop comme si c'était plat. On n'a pas de base de mesure fiable (faudrait qu'on trouve un moyen de caler l'iphone sur une zone plate du tandem pour vérifier) mais la pente doit osciller entre 15 et 20%. La route est nickel, un bitume parfait, mais on ne comprend pas comment quelqu'un a pu concevoir une route comme ça. Même les bidules motorisés à 3 roues ont du mal à monter. Nous on pousse, à pied, en finissant de se détruire les muscles qui ne l'étaient pas déjà. C'est le genre de moment où tu as envie de t'asseoir au milieu de la route, de poser le vélo et d'attendre. Sauf que le soleil farceur est déjà en train de passer derrière les montagnes. Montagnes, pas de soleil, altitude, c'est tout sauf le moment pour trainer si on ne veut pas finir en bloc de glace. On se trouve donc un chemin bien pourri sur lequel planter la tente. On n'en peut plus, on est vannés, on a fait 50 bornes alors qu'on aurait pu en faire 60 en moins de temps. On se réconforte en mangeant quelques dragibus qui nous restent de notre dernier colis grec (oui on les fait durer) et on commence à envisager très sérieusement l'idée qu'on évoque depuis quelques jours "on va prendre un train pour rejoindre Naples"
En bas la SP430 nous nargue, son tracé délicat au fond de la vallée...

285è jour : Au milieu de nulle part - Napoli

22 janvier 2012

16,2 km, 11556 km au total

Je m'en doutais un peu hier soir en constatant que le petit bol de purée ne passait pas très bien et ça a été confirmé pendant la nuit... la digestion ne s'est pas vraiment bien passée. Hélène n'est pas en grande forme non plus... on prend pleinement conscience des effets cumulés des efforts et du moral sur la santé. Il faut croire que je n'ai pas digéré le mauvais plan d'hier.
Toujours est-il qu'on décale le lever histoire de profiter un peu plus du duvet pour se reposer. Le petit déjeuner est donc très très light et nous repartons aussi très très tranquillement.
A vrai dire, tranquillement n'est peut-être pas le mot exact. Très lentement est nettement plus approprié. On commence par une pente à 15-20%, en poussant le vélo sur 1,25 kilomètre. Pas moyen de faire autrement tellement ça monte sévèrement. Comme introduction à la journée ça met la barre assez haut. On se fait doubler de temps en temps par une voiture ou un petit camion, tout le monde nous regarde façon "ils sont fêlés eux" mais bien-sûr aucun ne daignera avoir la moindre attention, la moindre sympathie. On commence à prendre l'ampleur de la chaleur humaine... grecque. Les pays se ressemblent beaucoup du côté de la géographie, mais au niveau humain ça n'a rien à voir.
Arrivés en haut on hésite un peu sur les routes, on se fait doubler par un cycliste du dimanche (vélo carbone) qu'on arrête pour demander notre chemin pour rejoindre Agropoli. On n'a pas trop envie de se planter, de descendre à fond les ballons et de devoir tout remonter ensuite. Sa réponse est simple "bah suivez les panneaux". Ah bah ça ça nous aide bien puisque justement on est à une intersection et qu'il n'y a pas d'indication. Décidément c'est la journée.
S'ensuit une descente absolument magnifique. 10 bornes à faire chauffer les jantes en profitant du paysage exceptionnel de la région. Il y a de la brume, des trous de soleil entre les nuages, bref exceptionnel.
La route nous mène directement là où on voulait : la gare. On a pris les horaires hier via notre relai toujours aussi efficace Internet-SMS prénommé Lucas (merci à toi pour toutes les petites aides de ce type) et à 11h20 on est à la gare pour un train à 11h53. Parfait. On prend les tickets, on a un ticket officiel pour le vélo, au moins on est sûrs de ne pas se faire jeter.
On patiente sur le quai, et une demi heure plus tard on voit le train arriver. Ca s'annonce compliqué vu que ça ressemble un peu à un TGV avec autant de place que les célèbres horreurs françaises (horreurs pour les vélos). On pousse le tandem dans le couloir, il va bloquer tout le passage, impossible de lui faire faire le moindre mouvement et je m'inquiète un peu de savoir où on va pouvoir mettre la remorque (peut-être via une autre porte) ainsi qu'Hélène qui est encore sur le quai.
Ma réflexion ne dure pas longtemps puisqu'arrive le contrôleur ou chef de train ou je ne sais pas comment ça s'appelle... ah si en fait, ça s'appelle Connard n°2 qui nous gueule dessus que c'est n'importe quoi, que les vélos n'ont rien à faire ici, que le train n'est pas fait pour. On montre notre billet, il nous fait comprendre que c'est pour les trains régionaux et pas intercité (ah ben oui c'est sûr qu'on voit bien la différence nous). On redescend donc le tandem en catastrophe sous ses engueulades. On ne percute pas trop mais par la suite Hélène s'en voudra de ne rien avoir répondu et d'avoir accepté qu'on nous parle comme ça.
Nous voilà donc sur le quai, le train repart... et après consultation des horaires il y a un bien un second train, dans 2 heures qui a le petit picto "vélo".
Du coup 2 heures à poireauter. On en profite pour pique-niquer un peu au soleil avant qu'un policier débarque et veuille voir nos passeports. Faut croire que des gens à vélo qui trainent 2 heures dans une gare ça sent le terroriste à plein nez. Il veut les embarquer pour on ne sait quoi, je viens avec lui malgré ses protestations. Comme vous le savez, voir disparaître nos pièces d'identité sous nos yeux on n'aime pas trop. Une fois dans le bureau (heureusement juste à côté) la vérification prend 3 plombes. Je crois avoir compris que sur l'ordi son collègue ne sait pas trop quoi mettre dans la case "type de pièce d'identité". Après 2 coups de fils dignes d'une pièce de théâtre et encore 5 minutes, tout est ok, je repars. Les 2 policiers ont probablement justifié leur salaire de ce dimanche...
De retour sur le quai et après encore un peu d'attente nous pouvons enfin monter dans le train. Cette fois il y a bien un espace pour les vélos, il faut juste aimer les marches. Encore un concepteur de wagon qui n'a jamais utilisé un vélo de sa vie.
Le contrôleur pas spécialement aimable ne nous embête néanmoins pas avec nos billets qui seront "périmés" avant l'arrivée du train puisque nous les avons poinçonnés il y a 2 heures et qu'ils ne sont valables que 180 minutes pour nous et... 140 pour le vélo (allez comprendre la différence). Par contre il reviendra nous voir pour nous demander d'accrocher le vélo au crochet. Je le regarde, il regarde le vélo et comprend "ah c'est un vélo long"... oulala il a du faire des études longues lui. Encore une rencontre super positive de la journée.
Néanmoins on se sent bien, prochain arrêt pour nous : Naples, avec d'après ce qu'on déduit des infos qu'on a : douche chaude et lit. Après moultes arrêts on arrive à bon port. Par magie la gare est intégralement au rez de chaussée et on peut donc faire rouler le vélo sans souci.
On active le GPS et après quelques péripéties dans des micro rues on arrive devant l'appartement dont on a l'adresse. On envoie un texto à mes parents qui font l'intermédiaire avec la surprise et on attend.
La surprise arrive, c'est cool !
On profite du confort de l'appart, de la découverte de la surprise, d'un thé assis ailleurs que par terre... et d'une douche avant d'enchaîner sur un diner léger à base de pâtes en papotant puis avec la découverte d'un bon matelas et d'une couette.

286-291è jour : Napoli (jours off)

23-28 janvier 2012

0 km, 11556 km au total

Nous profitons de l'appartement pour nous reposer, de mes parents pour discuter, prendre des nouvelles, prendre du temps et bien entendu de la ville de Naples pour se balader. Il y a des églises tous les 100 mètres, on en visite un certain nombre. On découvre également les subtilités de la ville. Mais je crois que c'est plus intéressant en photo qu'en récit.
Je regrouper un peu tous ces jours en un seul morceau car il y a des jours avec et des jours sans. On profite en effet de l'appartement pour se reposer et pour soigner un peu notre santé qui a des hauts et des bas et des rechutes. On y va donc doucement.

Quelques excursions/trucs à Naples :

Pompéi. Après un petit trajet en train nous aboutissons à Pompéi Scavi. Nous sommes immédiatement plongés dans le royaume de la vieille pierre. Rien de péjoratif, c'est très intéressant. Ce ne sont pas les vestiges d'un village mais vraiment d'une ville. On arpente les pavés irréguliers et découvrons au détour de chaque rue une ancienne maison, de thermes, des boutiques, un théâtre... Là encore le paquet de photos est souvent plus parlant que le blabla, mais grâce au petit guide papier et au plan (qu'il ne faut pas oublier d'aller chercher car ils ne sont pas au même endroit que la caisse pour les billets) on en apprend énormément sur la vie des romains il y 2 000 ans. Un séisme puis l'irruption du Vésuve ont mis un terme à la prospérité de la ville... non en fait ont mis fin à la ville tout court.
On y passe la journée avant de rentrer avec des bâtons à la place des jambes.

Vésuve : Périple un peu compliqué, train direction Sorrento, arrêt Ercolano. Là il doit y avoir un bus mais nous n'en voyons pas trace, nous prenons donc une navette (9 places, compagnie privée,... à 10 dans le mini-bus... à l'italienne quoi), cool. Une fois le gros du volcan gravi notre navette nous laisse faire la fin à pied... et passe nous récupérer moins de 2h plus tard. Et c'est non négociable. Il ne faut donc pas trainer. On prend la direction du sentier vers le cratère pour découvrir qu'il faut une nouvelle fois cracher au bassinet. 2,10 euros de train, 10 euros de navette, 8 euros d'entrée pour avoir le droit d'approcher le cratère. Ca fait cher la sortie. Néanmoins après une grimpette sympathique l'arrivée sur le bord du cratère est magique. A gauche de la roche, des émanations de souffre, des cendres, à droite une vue imprenable sur toute la baie de Naples.

Pâtisseries : on se fait plaisir en poursuivant la découverte des pâtisseries italiennes notamment des déclinaisons de "sfogliatelle", ces petits chaussons de pâte super croustillante qui ressemblent à des coquillages. Nature (crème à base de ricotta/orange), au chocolat (une tuerie) et même à la menthe (très bons). Il y a aussi les petits rouleaux "cannellonis", là aussi fourrés à la ricotta, c'est bien bon. Comme on nous a dit récemment "avant de lire le récit d'Hélène et d'Olivier et de regarder les photos il vaut mieux avoir mangé".
En tout cas on profite des différentes pâtisseries et du fait que nous sommes 4 pour acheter plein de variétés différentes et les goûter jour après jour... un peu comme à Athènes.

La conduite italienne. Jusqu'à présent nous avons surtout fréquenté les petits bleds et les villes balnéaires un peu désertes. Naples étant la 3è plus grosse ville du pays on découvre un paquet de voitures, les conducteurs tous un peu fous qui semblent confondre petites rues étroites et circuit de course automobile. Quand on voit l'état des voitures cabossées de partout on se dit qu'ils ne maitrisent pas toujours autant qu'ils aimeraient laisser paraître. La voiture c'est une chose mais le cran au dessus ce sont les scooters. Dans le centre de Naples il y en a encore plus que les voitures et là c'est l'anarchie totale : descente d'escaliers, sens interdits, rues piétonnes. Et là encore c'est en mode "sprint". Ils déboulent de partout, poussent des coudes et surtout... du klaxon. On découvre le langage du klaxon. 2 petits coups brefs c'est LE truc à la mode ici. Traduisez : "j'arrive, faites ce que vous voulez mais moi je passe alors si vous pouviez vous coucher rapidement dans un coin contre un mur pour me laisser passer ça serait mieux pour votre survie". Tut Tut. On n'a pas encore expérimenté les bouchons ou même la conduite sérieuse dans tout ça (on est arrivés un dimanche et avons fait 2 km pour rejoindre l'appartement) mais ça s'annonce très sport.

La poste : dans la série on poursuit les bonnes blagues... le colis de la mère d'Hélène n'a toujours pas refait surface, ni à Chiaravalle ni en France. Le colis de Mathieu renvoyé par Marie-Violaine à Naples (donc d'Italie à Italie) n'est pas arrivé à notre adresse napolitaine. Super... On demande au propriétaire s'il est ok pour le renvoyer quelque part lorsqu'il le recevra... et déjà on espère simplement qu'il arrivera un jour...