173è jour : Muzla - Budakalasz

2 octobre 2011

68,9 km, 7399 km au total

Après une dizaine de kilomètres ce matin, une nouvelle tentative de contacter un autre warmshowerien car pas de réponse du second, on passe un joli pont pour arriver en Hongrie. Une magnifique basilique nous souhaite la bienvenue mais son altitude nous imposera de la voir de loin et de s'en contenter. C'est d'ailleurs un peu le signe de la journée, la route s'éloigne régulièrement un peu du fleuve et nous prenons de l'altitude. Bon rien de dramatique, l'eau doit être à 110 mètres au dessus du niveau de la mer, nous monterons à 165 au plus haut. On laisse tomber la route officielle par moments pour privilégier la simplicité, le bitume et aussi le coût. A un endroit nous devions prendre un bac... mais il est payant (pas grand chose) mais nous n'avons pas le moindre Forint en cash sur nous. Tant pis.
On pique-nique au soleil et en plein vent. C'est déroutant de découvrir quand on s'arrête (alors qu'en roulant il n'y avait pas de vent) qu'en réalité on s'est bien fait pousser toute la matinée. Parfait pour le séchage. On regarde les canards, les péniches et les wakeboardeurs qui s'en donnent à cœur joie en ce superbe dimanche. On sent que toute la Hongrie est dehors pour profiter de ces derniers moments de soleil et de chaleur avant de se cloitrer derrière les doubles-fenêtres, le triple ou quadruple vitrage pour se protéger des affres de l'hiver.
Côté bouquins, après avoir fini de dévorer mon 6è et dernier Nothomb disponible (Ni d'Eve ni d'Adam, un bon moment de rigolade, je recommande), direction du plus torturé : Sur la Route de Jack Kerouac. J'ai failli m'endormir (ou enrager au choix) devant l'imbuvable préface du genre "mais en fait on s'en fout totalement", préface qui représente quand même 22% du bouquin... pénible, j'ai zappé rapidement. Le bouquin est donc un espèce de roman fleuve qui raconte le voyage vers l'ouest, sur les routes donc, d'un jeune américain dans les années 1950. Il paraît que c'est un peu l'œuvre qui a défini le concept de road-movie ou road-bouquin, on verra. Je vous dirais ce que j'en pense à la fin mais pour l'instant c'est plutôt sympa. L'histoire veut que ce bouquin ait été écrit en 20 jours sur un rouleau de papier de 40 mètres sans le moindre saut de ligne, chapitre ou autre élément facilitant la compréhension, en gros c'est "je m'installe devant ma machine à écrire et j'écris jusqu'à ne plus avoir de doigts". La réalité est un peu plus nuancée mais c'est l'esprit en tout cas.
Nous reprenons notre route à nous et nous approchons donc de Budapest. On sent l'influence de la capitale car il y a beaucoup plus de monde. La piste cyclable est truffée de cyclistes du dimanche, de vélos en carbone, de vtt sous-gonflés, de petits vieux qui baladent chiens et petits-enfants... la piste devient très barbare sur la fin, on souffre sévèrement de l'arrière-train. Les passages terre-battue nous battent les fesses mais le mirage du bitume ne nous laisse lorsqu'il devient réalité pas de meilleure impression tellement il est en sale état. A 20 bornes de la Grande Ville c'est intolérable, "on va écrire" pour se plaindre :)
On commence comme toujours à flipper un peu de l'absence de lieu bivouaquable mais finalement après une petite virée dans un petit chemin forestier on se retrouve nez à nez avec notre fleuve adoré. L'endroit parfait pour planter la tente même si on préfère reculer de quelques dizaines de mètres plutôt que de planter sur la plage pourtant si accueillante. Autant maintenir notre sérieux de "pour vivre sans se faire piquer son vélo vivons cachés" plutôt que de flamber en s'exposant on the beach. Par ailleurs quelques décimètres d'altitude signifieront probablement quelques degrés de plus dans la tente car la proximité de l'eau va probablement rafraichir très sérieusement la nuit. 8°C ce matin, s'il fait 5°C humides demain ça ne sera pas super sympa pour le petit déjeuner... petit déjeuner que - j'avais envie de le rappeler à Hélène ce matin - nous prenons systématiquement "au lit" lorsque nous bivouaquons. Un an de petit dej au lit, ça fait rêver non ? Allez je vous laisse, demain c'est lundi une bonne partie d'entre-vous retourne bosser, NA ! :-)

174è jour : Budakalasz - Budapest

3 octobre 2011

24,3 km, 7423 km au total

Le réveil dans la forêt au bord de l'eau est un plaisir. Pas de rosée ce matin (un jour on essaiera vraiment de comprendre comment ça fonctionne) et contre toute attente nous n'avons pas du tout eu froid. Un petit tour sur la plage prendre quelques photos au saut du lit c'est le genre de moment magique, vous savez un de ceux qui justifient à eux seuls le voyage tout entier.
La route nous amène petit à petit à proximité de la capitale et nous stoppons un peu avant devant un immense Auchan. C'est l'occasion de faire 2 choses :
- essayer de gérer notre plan hébergement de ce soir grâce au wifi trouvé à l'intérieur. Pas de réponse de nos 2 Warmshoweriens contactés (pas cool), mais un nouveau semble disponible, on le contacte en lui demandant de nous faire une réponse rapide, si possible par SMS.
- ravitailler car en l'absence d'info plus précise on va gérer notre alimentation comme si on n'allait chez personne.
Là il faut dire qu'on est tous les deux totalement décontenancés devant l'hypermégamarché. C'est bien simple il y a un double rayon, le truc genre 30 mètres de long et des 2 côtés juste pour du papier toilette. Ah et les mouchoirs en papier, le sopalin et autres dérivés c'est dans un autre rayon !
Même chose pour le dentifrice. Je regrette de ne pas avoir fait de photo mais il doit y avoir entre 50 et 100 références différentes. Idem pour les brosses à dent. Je ne sais pas si c'est nous qui évoluons ou si c'est les grandes surfaces mais on est totalement dégoutés, désespérés et perdus devant un tel choix ! Comment choisir un dentifrice qui rendent tous les dents sensibles plus blanches ??? Et une brosse à dent ? Souple, medium ou dure ? ok mais pourquoi 100 références ??? l'hallu totale, la décadence à son comble.
Rayon charcuterie on est tout aussi perdus, incapables d'avoir 2 références qui nous intéressent sous les yeux, elles sont tellement éloignées les unes des autres qu'on ne peut pas voir le prix, le poids, ... des 2 en même temps. Oui, on est vraiment perdus.
Du coup on met 1h30 pour remplir notre sacoche et on ressort un peu dégoutés, mais avec un magazine hongrois d'architecture pour donner des idées à Hélène...
On rejoint les rive de Buda (la partie ouest de la ville) et on se pose, la tête pleine de souvenirs non loin du parlement (mais de l'autre côté). On n'arrête pas de se dire "ah je me souviens" ou "ah oui on était passés par là". C'est la première capitale du voyage dans laquelle nous avons déjà mis les pieds. On regarde ce qui a évolué (ah le parlement est mieux rénové maintenant, tiens les abords du château sont toujours aussi délabrés...), c'est agréable.
Le wifi dispo sur notre lieu de pique-nique (merci les routeurs ouverts, ça fait plaisir) nous apprend que notre ultime warmshowerien n'est en réalité pas disponible. On laisse tomber et on s'oriente vers le plan hôtel. Notre guide petit futé (pour une fois qu'il est bien) nous indique que globalement c'est soit des dérivés d'auberges de jeunesse, soit des hôtels vites un peu luxueux. Par contre autre alternative, louer un petit appartement. Ils en recommandent un "Agape", dans le centre et qui semble pas cher. On va sur leur site on on a confirmation qu'on peut avoir un studio pour 2 pour moins de 50 euros la nuit.
Pour vérifier si c'est dispo on tente une réservation en ligne et c'est finalement 35 euros la nuit, cool. On ne va pas jusqu'au bout mais on prend notre vélo pour aller directement sur place. Le prix est bien celui auquel on s'attend, il faut juste payer d'avance en cash. On demande un studio sur la cour (plus calme que sur la rue, conseil du petit futé), on attend un peu car il est en train d'être nettoyé et on monte notre bardas. Il y a une vraie cuisine et une baignoire, le pied.
Vous vous dites qu'on a déjà passé pas mal de temps "en dur" ces derniers temps : Varsovie, Cracovie, 4 jours à Vienne, une nuit à Bratislava, mais là c'est très différent. En fait le warmshowers/couchsurfing c'est génial pour discuter, découvrir une culture, une ville, mais est également synonyme de promiscuité. Souvent on dort dans la séjour, partage une chambre, ... donc côté intimité, liberté de faire ce qu'on veut quand on veut ça n'est pas l'idéal. Là pour la première fois depuis le départ on a notre petit "chez nous" rien qu'à nous. On a même l'espoir de pouvoir regarder un film (on a la Liste de Schindler en attente suite à la visite d'Auschwitz et quelques "Sissi" suite à la visite de Vienne), c'est tout dire.
On a laissé le tandem dans la rue en repensant sortir mais c'est bien là une question à 1000 euros : va-t-on réellement ressortir ce soir ? on verra bien. En attendant il fait faim, oui ok il est 17h30, mais on a un rythme solaire voyez-vous :)

Edit : on est finalement sortis chercher le tandem, il tient tout juste dans l'ascenseur, ouf, parce que sinon c'était 6 étages !
Ensuite Sissi 1er volet : mièvre à souhait, rétro et lent comme il faut pour énerver, mais ça fait plaisir de se dire "regarde c'est le château de Schönbrunn !"...


175è jour : Budapest (jour off)

4 octobre 2011

0 km, 7423 km au total

Aujourd'hui est un vrai jour de repos, pas de récit...

176è jour : Budapest (jour off 2)

5 octobre 2011

0 km, 7423 km au total

On continue à profiter de nos mini vacances avec un programme aussi chargé que grasse mat', farniente, sieste, repos...
En vrac quelques détails des 2 jours :
On a pu voir la liste de Schindler et le second Sissi "Sissi Impératrice" (mieux que le premier mais les 12 minutes de final sont interminables).
On a (re)profité des bains de Szechenyi, une piscine extérieure à 32°C voilà ce que j'appelle une piscine agréable. Non mais les plans à 26°C où on ose dire "ah elle est bonne" c'est du fout*ge de gu*ule... là on se prélasse, on traine, on est bien, on profite de quelques remous et courants, on sort histoire de se sentir vivants "ah oui ça pèle dehors avec le petit vent frais"... et on rentre très vite à l'intérieur profiter d'une eau à 35 et même 38°C une vraie baignoire. Le système s'est amélioré depuis notre dernière visite, les vestiaires sont plus simples (bracelet type badge Vigik pour rentrer dans son immeuble qui sert à verrouiller le casier de son choix). Seule déconvenue, le refus de la caissière de nous rembourser une partie du prix du billet alors que nous sommes restés moins de 2h (normalement le concept c'est de payer le prix pour "la journée" et ensuite de récupérer un peu d'argent si on n'a pas passé la journée entière, là la caissière fait genre je comprends pas, non ça ne fonctionne pas comme ça... impossible de savoir si ça a changé ou si elle nous considère juste comme des touristes à plumer...)
On s'est un peu baladés sans trop savoir où aller. On a constaté que lors de notre précédente expédition pourtant courte on avait bien optimisé, donc ces quelques jours nous donnent plus envie de profiter du repos du studio que de réarpenter le pavé et les collines de Buda...
Donc peu de photos (retrouvez-en quelques unes de notre séjour précédent ici : http://www.olivierbouillaud.com/cal/2010-03-22/bains-de-szechenyi et en cliquant sur chaque photo ensuite) de cette pourtant formidable ville, qui nous plait beaucoup par sa triple opposition : jolis bâtiments baroques, rococos & co versus bâtiments soviétiques (mais il y en a assez peu finalement) versus bâtiments délabrés en vraiment sale état... et ces derniers il en reste encore un paquet. Le tout forme un joli mélange, bizarrement moins oppressant que Riga à nos yeux.
Etant donné le budget hébergement (pas cher pour ce que c'est mais toujours très élevé par rapport à notre budget global / merci aux généreux donateurs qui nous aident pour ce poste) on a beaucoup mangé dans l'appart. On en a profité pour cuisiner un peu. Hélène a préparé un poulet au paprika (épice bien locale), on a bu du très bon Tokaji aussi...
On galère avec notre f*cking pack de batterie. Le SAV de la société qui le fabrique : Tekkeon pour les citer est du genre pénible à souhait puisqu'ils fabriquent des produits destinés aux nomades mais ont une politique de service après vente faite pour des sédentaires. Ils sont bien gentils de demander le renvoi du pack défectueux pour qu'ensuite ils nous en renvoient un autre mais en attendant moi je n'ai rien pour charger le macbook puisque ce pack de batterie sert en même temps de chargeur. J'ai expliqué en détails la situation, le problème technique, j'ai même fait une vidéo pour montrer en "live" ce qui se produit pour bien leur montrer qu'il déconne mais non, ces gentils américains sont englués dans le protocole officiel de RMA (Return Material Authorization) et ça s'annonce donc bien pourri. Gros carton rouge à Tekkeon !!!

En tout cas hormis ces petits détails, ça nous fait un bien fou de profiter de ces quelques jours de retraite avant de réattaquer de plein fouet demain. Nous attaquons le second guide de l'eurovélo 6 (second pour nous mais c'est le numéro 4 sur 5 dans les faits) direction plein sud à la frontière entre Hongrie, Croatie et Serbie. Nous obliquerons ensuite vers l'est pour rejoindre Belgrade.

177è jour : Budapest - Tököl

6 octobre 2011

31,8 km, 7455 km au total

Ce matin nous devons rendre l'appart, un peu la larme à l'œil parce que c'est en quelques sorte la fin des vacances dans les vacances? L'autre œil peut aussi avoir droit à sa petite larme, Steve Jobs est décédé, pas cool.
On quitte donc Budapest par le sud et la route est très moyenne. C'est pas super bien indiqué et le guide n'est pas hyper précis sur des passages pourtant un peu délicats genre passer sous un pont, revenir dessus, faire la boucle, tirer la ficelle, ah non ça c'est pour les lacets, heu enfin en gros les classiques bretelles à éviter et celles à prendre qui font toute la différence entre être sur une jolie piste cyclable ou l'autoroute ne sont pas super bien indiquées.
On s'en sort, on profite d'une petite errance pour acheter du gaz chez Obi et nous reprenons la route pour essayer de longer au mieux notre fleuve du moment.
On pique nique dans un champ en regardant un cheval qui essaye de s'habituer à son harnais puis à une calèche, c'est pas gagné mais bon c'est pas trop notre problème non plus.
L'après-midi est courte car le chemin est bien pourri, une digue avec de l'herbe parfois usée suffisamment pour avoir de la terre bien tassée mais parfois aussi du sable, bref on avant à 2 à l'heure, ça tressaute en permanence, Hélène a mal aux fesses, on se pose donc de bonne heure dans un autre champ près des maïs desséchés qui attendent patiemment leur heure.

178è jour : Tököl - Apostag

7 octobre 2011

59,6 km, 7514 km au total

Sur la route... la route s'annonce belle ce matin même si la météo nous a indiqué le contraire hier. Le soleil essaye de poser ses rayons sur les rayons de nos roues ou plutôt sur les coutures du tarp et de la tente mais un vilain nuage vient s'intercaler entre l'astre chauffeur et nous. Rien à faire on abandonne le combat, les nuages sont là, nous on est déjà las de savoir qu'il vont rester là. Et le vent ? pas notre pote pour deux sous par moment mais parfois bien contents de l'avoir avec nous. Va savoir, ça va, ça vient, nous on est comme ça, on aime ou on aime pas (mais on fait pas beurk). Le petit dej c'est tout bon, muesli et petits oreillers au chocolat pour Hélène qui aimerait comme toujours plutôt rester avec son oreiller tout court. Pieutés avant 21h et toujours difficile de sortir du duvet neuf heures plus tard. 12°C dans la tente, 9°C dehors, pas trop envie de sortir, tu m'étonnes. La belle éveillée finit quand même par s'habiller pendant que j'en suis déjà quasiment à finir mon petit déjeuner, c'est un peu ça le rituel du moment. On se décale, j'offre 30 minutes de répit à la belle endormie pendant lesquelles je commence à ranger les affaires, plier les bagages pour retourner comme chaque jour ou presque sur la route. Le tarp et le double toit bien trempés, rangés dans le petit sac presque étanche lui-même dans un sac étanche, on déride nos jambes et déroule les roues sur le bitume moyen pourri d'une petite route de campagne. Il est 8h, le vent dans le pif on égrène les kilomètres. Un bled, un Tesco, crissement de pneus, c'est le moment de ravitailler. Chrono en main, pit-stop, 8 secondes 12 ? Pas vraiment. On prend de la purée pour changer, pas mal de charcuterie et de fromage pour tenir les 3 prochains jours... car après-demain c'est dimanche, et dimanche c'est compliqué de trouver à manger, on préfère assurer. 5322 HUF. On déboule dans un carrefour machiavélique qui nous fait comprendre qu'on va devoir se rallonger pour éviter un minable chantier public juste pour nous pourrir la vie. Droite, gauche, tout droit... bon tant qu'on est dans une pseudo ville trouvons du wifi pour voir si la pluie de la journée va nous tomber dessus ce matin comme prévu ou si on a un peu de répit. Un linksys foireux s'enchaine avec un Netgear verrouillé mais on trouve finalement un de ses potes, ouvert comme il faut pour qu'on reçoive un petit email sympa (Marie-Do c'est en effet un genre de boisson étrange : un sachet comme du Tang, tu le verses dans 0,6 litres d'eau pour te faire un fabuleux soda. Par pur hasard on l'a fait dans un bidon de 1 litre, heureusement car ça s'est mis à mousser et à monter comme si on avait lancé un Mentos dans une bouteille de Coca). La météo nous indique qu'à partir de 14h rien n'ira plus... on repart songeurs, un monsieur s'arrête à notre hauteur et nous demande en allemand si on cherche quelque chose... non merci tout va bien. Gauche, gauche, gauche, ah enfin notre pont à droite, on n'y croyait plus. Hop un petit saut et on change de côté, enfin tout est relatif car le Danube est un peu compliqué, faut pas croire qu'il s'agit d'un sage fleuve qui fait de jolis méandres comme ça pour le plaisir de se rallonger avant de retrouver la mer. Il se sépare, fait des bras, des pieds et des mains, se sépare et se répare au gré de ses envies. Il faut donc jouer avec les ponts et les digues pour se trouver toujours du meilleur côté, celui du bien et éviter le mal autant que possible, là où ça monte, ça vente ou ça rallonge. Pause barre de céréales, réflexion. Hélène me fait part à haute voix de la pensée qui me trotte dans la tête depuis pas mal de kilomètres : Si on doit se prendre 4 mm de pluie entre 14 et 17 heures, que ça doit s'empirer ensuite, il serait peut-être plus sage de chercher à faire notre devoir avant de rencontrer dame goutte. Tope-là, c'est partie, chiche, les 50 km on les fait ce matin, enfin on peut faire durer le matin jusqu'à 14 heures. Dans ces moments-là j'ai un devoir, une obligation : faire prendre conscience à ma chère accompagnatrice que dame météo elle a aussi tendance à vivre sa vie à sa manière, parfois un peu fofolle, parfois normale, parfois délurée. Bref, c'est pas parce que www.yr.no (notre site météo préféré depuis pas mal de mois, bien plus sympa que météo-france-bourré-de-pubs-en-flash-qui-ralentit-ton-ordi-alors-que-je-suis-une-institution-100%-publique) et avec un "météogramme" très agréable à lire (en une image les nuages, la température, les mm de pluie...), on vous recommande ; en haut à droite du site il y a un petit drapeau anglais parce que sinon en norvégien c'est un peu rude... et oui oui il y a bien toutes les villes de France et d'Europe que vous voulez, pas juste la Norvège. Donc bref c'est pas parce que YR dit qu'à quatorze heure les jeux sont faits, rien ne va plus qu'il ne faut pas s'attendre à prendre la drache de notre vie dès midi. On entérine malgré tout le concept de rouler jusqu'à plus soif avant de planter la tente, journée finie... mais d'abord une petite barre de céréales parce que voyez-vous il fait faim et qu'on a de la route à faire. Et vas-y que jte transforme la route en chemin bien pourrax. Ah c'est joli, ça suit l'eau, parfois c'est même entre deux bras de fleuve/canal. Il y a des paquets de petites maisons de vacances sauf que la majorité a l'air occupée. On croise plein de monde qui nous fait des Jo reggelt ou je ne sais quoi qu'on suppose être bonjour. On imagine souvent qu'en fait les gens nous disent "bande de tarés" ou "vous savez les voitures ça existe", nous on s'en fout, on est sur la route et on est bien. Je passe mon temps à dire "trou", "bosse", "TROUUUUUU DUR" et Hélène hurle à la mort, plus fort que les sales clebs qu'on croise, quand la selle lui remonte jusqu'aux amygdales. Après quelques kilomètres de goudron lisse, de nouveau l'affront terrible, l'Eurovélo 6 c'est là, tout droit, nous on n'en veut plus de cette digue herbeuse, on veut de l'imberbe, on veut du glissant, du fluide, pas de la caillasse et des racines. Gauche, 3 kilomètres, droite, hop on se fait une parallèle. Faut dire que depuis notre séjour matinal chez Tesco le vent à eu la bonne idée de changer radicalement de sens. Du coup les ouest et les sud on les aime bien. Nos 3 kilomètres des décalage latéralement sont donc envolés littéralement. Nouvelle digue, mais cette fois du dur, ça continue à swinguer, nous on aime. Du coup on s'offre quelques kilomètres de rab, la pluie ayant la bonne idée de ne pas arriver en avance. On passe sous l'autoroute, ce qui nous oblige encore à poursuivre un peu pour nous en éloigner ; les camions à tue-tête 24/24 si on peut éviter, c'est toujours ça de gagné. Petite descente, en contrebas on passe sous les arbres, et derrière, tada, beau champ herbeux, coin repos idéal et repas désiré, désirable même. Pour faire durer cet état de liberté contrecarré par l'envie de tuer et ingurgiter un sanglier on joue à faire sécher la tente, à la monter, même à faire un peu de réparation de vélo, ou plutôt de porte-bagages qui morflent pas mal avec les chemins. On met du gaffa sur les parties sur lesquelles les sacoches cognent à chaque trou, bosse, cailloux. La peinture est partie depuis belle lurette mais voir le métal attaqué commence à nous faire un chouilla peur... On a de la route à faire nous, encore pas mal. Un peu d'huile sur les chaînes aussi car la poussière a déshydraté nos maillons forts, qui sont forts utiles pour répartir note force et la convertir en kilomètresheures. Ce midi le pique-nique est donc dans la tente, la vraie complète avec chambre et double toit. Sandwiches à base de pain de mie, on se regarde, les yeux dans les yeux, presque la larme à l'œil en faisant le constat que c'est la première fois depuis le départ qu'on a acheté du pain de mie. Faut dire que en Allemagne, en Scandinavie et dans les Etats Baltes ils savent faire du pain, pas du pain de petits joueurs comme on fait en France avec de la farine raffinée qui rend le pain seccos et immangeable passé 24 heures, non du vrai pain noir, qui tient au corps, du vrai index glycémique faible qui te fait pédaler toute la journée. Depuis la Pologne c'est un peu la misère, retour au pain blanc en grande majorité, quelques pains complets très moyens, des pains tranchés avec des tranches de 1,5 centimètres d'épaisseur, pas génial pour les sandwiches... Ah ma ptite dame, c'était mieux avant. Du coup ce midi on s'est rabattu sur le carré, le moelleux, ça change. La salade qu'on aime tant étaler sur notre pain est restée introuvable ce matin. On s'est rabattus sur un genre de fromage frais à la tomate/oignon/poivron. C'est plutôt pas mal, ça change. C'est une de nos grandes phrases, lassés de rien dans les faits mais contents de nos petites victoires d'avoir trouvé quelque chose pour "changer". Cet après-midi, après le café, on ne se retrouve donc pas sur la route. Au contraire on s'étale sur le sol, enfin sur les matelas et dans les duvets parce que sacré bleu il fait froid. Hélène passe instantanément en mode sieste qui laisse des marques sur les joues pendant que je reprends mon autre route, sur l'iphone en regardant la batterie se vider petit à petit. Petite pensée pour ceux qui bossent, qui gèrent des RMA à longueur de journée ou qui s'ennuient ferme à faire croire qu'ils travaillent. On profite, on est bien, on remonte le zip jusqu'en haut pour faire notre petite chaleur. A 16h on se regarde, les yeux dans les yeux, presque la larme à l'œil "alors là on dirait qu'on cherche un endroit pour bivouaquer, et on monterait la tente...". On sourit, on est bien. Ca fait maintenant deux heures qu'il pleut, ça a débuté à 14h15, on était bons côté timing. Hélène sort le Kindle, chargé à bloc à Budapest et se relance dans des histoires de vampires. Moi je sors l'ordi pendant que l'iphone se recharge. J'écris dans le duvet, c'est bon même si ça fait un peu mal aux jambes. Aujourd'hui sur la route j'ai écrit 10 000 signes sur la même ligne, il s'en passe des choses sur la route. Le soir on accepte sans sourciller l'idée qu'il va faire nuit avant qu'on ait pu faire quoi que ce soit. On a déjeuné tard, impossible d'envisager diner à 17h30... on laisse le temps filer, on bouquine et puis tant pis. On allume les frontales, on sort le réchaud qu'en fait on n'a pas rentré vu qu'on n'a pas déménagé depuis le précédent repas et c'est partie pour l'opération soupe puis purée avec du jambon blanc et du fromage. C'est bon, ça réchauffe. On s'oriente vers la compote Nestlé en dessert, c'était la moins chère du rayon bébé, parce qu'en Hongrie aussi les adultes n'ont pas le droit d'aimer la compote. Je connais un (Saint)aignanais qui serait malheureux. Le meilleur ce sont les petits beurres aux pépites de chocolat du Auchan avant Budapest. Ils ont tenu jusque là et comble du bonheur l'emballage est tout en français. C'est pas des LU mais des Auchan mais ils sont plutôt pas mal. Un petit moment de France passe dans la tente, cocorico. Vu que la soirée est à peine commencée Hélène a une bonne idée : tiens si on jouait aux cartes. Peut-être que finalement c'était ça le truc le plus inutile du voyage, le jeu de cartes. Ceux qui ont suivi savent qu'on a décidé de partir avec un jeu microscopique qui ne pèse pas grand chose mais il faut avouer que jusqu'à présent on ne s'en est pas servi. On le sort, on commence à réfléchir à quoi on pourrait jouer. Pas de quoi faire des jetons pour le poker, peut-être une bataille... tiens si on regardait dans Wikipedia les jeux de cartes... on regarde quelques trucs qu'on ne connait pas, on s'arrache les hémisphères de cerveau pour comprendre les règles, on capte que dalle, ok pour la bataille. Mais si on veut être tranquilles autant commencer par régler les problèmes basiques du genre vaisselle lavage de dents pipi. On gère tout ça et on rerentre dans la tente. On a eu du bol il y a eu une accalmie de pluie quelques minutes juste pour nous. On se regarde, ouais c'est clair on a bien plus envie de se vautrer dans le duvet pour bouquiner que de jouer aux cartes. On ajourne l'idée, on la reporte dans le calendrier... on verra bien, peut-être qu'on aura envie une autre fois. Il est donc l'heure de retourner sur la route, une autre route...

179è jour : Apostag - Fajsz

8 octobre 2011

58,6 km, 7573 km au total

Glagla ce matin, on mesure l'un de nos plus grands écarts de températures jamais constatés entre l'intérieur de la tente et l'extérieur : 12°C dans notre chambre, 6°C dehors à l'ombre. Il faut dire qu'il y a un petit vent frisquet qui nous gèle de partout. La tente étant mouillée, on se pèle les mains bien comme il faut. N'empêche que comme hier, il fait un temps magnifique même si quelques nuages au loin nous rappellent que la météo est annoncée très grise aujourd'hui.
On commence la journée par se taper les fesses sur trop de kilomètres sur la digue. C'est bien simple, ce matin il n'y a ni piste ni chemin de terre, la nature a totalement repris ses droits et c'est juste de l'herbe même pas usée mais heureusement tondue. On force - ah au moins ça réchauffe un peu - pour atteindre la dure cadence de 12 km/h. Le matin ça tue. Je finis par transpirer dans mon bonnet que j'ai remis pour la première fois aujourd'hui. La dernière fois ça devait être en Norvège à la fin du printemps... on commence à accumuler les petits détails qui nous font dire que ça se refroidit sérieusement : gants "longs", caleçon long le soir (je prête le mien à Hélène car à priori elle a laissé le sien... à Vienne ! pas cool). Bref il faut bien qu'on continue à tracer vers le sud avant de se faire rejoindre par l'hiver !

On finit par laisser tomber cette digue et on retourne sur la route. On a même parfois de la chance car ils ont créé une nouvelle belle route à côté de l'ancienne et on a donc en guise de piste cyclable une double voie. Même si c'est samedi on ne croise pas grand monde en dehors des villages qu'on traverse. Ce matin c'est SMC, encore un nom par défaut de routeur, qui nous offre des infos sur la météo (cool ça ne sera que gris pas de pluie au programme) et qui nous confirme que ces derniers temps Warmshower c'est n'importe quoi. On a donc une réponse pour Belgrade : non et nos 2 autres demandes faites à Budapest pour Baja et Novi Sad sont restées sans réponses. Je ne sais pas si c'est le fait qu'on n'est plus en période de vacances mais on enchaine les râteaux. On contacte donc une nouvelle personne à Belgrade. On a besoin d'avoir une adresse fixe longtemps à l'avance car on a besoin de l'utiliser pour se faire envoyer des trucs de France, notamment ce pu*ain de chargeur d'ordinateur portable pour pouvoir renvoyer le pack de batterie en SAV. M'enfin... ça va se finir en poste restante en Roumanie ou en Grèce tout ça...
Après une mini pluie étrange (fine goutes glacées alors que le soleil nous réchauffe en même temps) on enchaine avec le déjeuner-séchage-plans.
Le temps se couvre, on repart pour quelques kilomètres en décidant de rejoindre la piste officielle car c'est notre meilleure chance de trouver un endroit potable pour le bivouac. Après quelques kilomètres de route sympa même si on a un peu le vent dans le nez on retrouve la même digue pourrite. Ca commence pas trop mal avec de la terre bien tassée et du gravillon fin pas trop épais puis finalement le gravillon prend le dessus et cette fois on a vraiment failli se casser la figure, c'était moins une, freinage en catastrophe... C'est quand même stupide de constater qu'on risque de se faire mal non pas sur une route bourrée de camions mais tous seuls sur une piste cyclable en mauvais état. Bon l'avantage c'est que si ça se produit on tombe sur du sable ou de l'herbe, donc les risques de se faire mal sont moindres. On refait 1 km en zieutant où mettre la tente et on descend le talus pour rejoindre en contrebas une zone herbeuse bien horizontale. Clic clac, scénario bien rôdé et en quelques minutes on est au chaud dans la tente. Désormais nos heures sont :
6h15 lever, le temps de d'émerger un peu, de s'habiller il fait suffisamment clair pour y voir quelque chose (lever du soleil 6h50).
11h30 pique nique
14h-14h30 redépart
15h30 arrêt pour planter la tente
17h30 diner
18h30-19h aux plumes pour bouquiner car le soleil se couche à 18h15
Et oui c'est bizarre...

180è jour : Fajsz - Ujmohacs

9 octobre 2011

70,2 km, 7643 km au total

Encore 6 petits degrés ce matin au réveil... agla agla. On alterne encore pendant la matinée de la piste très inconfortable et du bitume bien lisse. Malgré les nombreux panneaux "interdit aux voitures" nous en croisons un certain nombre en ce dimanche frisquet et grisouille. Pas de soleil pour nous réchauffer ce matin.
Ce midi face au froid nous n'avons pas d'autre solution que de monter la tente pour manger un minimum à l'abri et faire un semblant de petite chaleur. On en profite pour sortir les carte et faire quelques estimations à long terme. Un peu moins de 1400 km pour rejoindre la Mer Noire à Constanta et le total se porte à 2000 pour aller jusqu'à Istanbul. Ca nous fait donc là-bas fin novembre/début décembre. Notre noël en Grèce s'avère donc pertinent. On pensait atteindre le sud de l'Italie mais c'est peu probable, Rome encore moins. On n'est pas pressés non plus et il ne vaut mieux pas qu'on remonte l'Italie trop tôt début 2012 histoire de ne pas se trouver bloqués par de la neige ou ce genre d'inconvénients. Essayons de profiter de l'hiver au sud.
Avec le rafraichissement par contre on commence à prendre un peu peur. 3/4 semaines avant de rejoindre la Mer Noire et ses températures plus clémentes, on espère qu'on ne sera pas congelés avant.
Le programme de l'après-midi consiste à repartir assez tôt pour faire 25 km et rejoindre, miracle, un camping. J'avertis une nouvelle fois Hélène sur la probabilité non négligeable qu'on bivouaque malgré tout car on peut ne pas le trouver, il peut aussi être fermé ou encore d'autres trucs abracadabresques qui font qu'on ne pourra pas rejoindre une douche chaude.
Nous expédions les kilomètres, avec toujours cette inconstance et imprévisibilité de la qualité du support sous nos roues. Un peu avant 16h, nous sommes devant l'entrée du camping. Il y a une grille, elle est fermée mais nous sommes accueillis par les aboiements d'un chien... et qui dit chien dit maître. On patiente, on fait tinter notre sonnette, on appelle... personne ne vient. Grrr ! la douche s'éloigne, la prise électrique aussi... on attend encore un peu, rien. Tant pis on fait 50 mètres pour s'enfoncer dans la forêt à côté et on sort notre tente et nos petites affaires. Un peu stupide et dommage mais on n'y peut rien. On s'offre une petite infusion bien chaude pour récupérer quelques calories et nous réconforter de l'absence de douche. On a bien roulé, il faudrait qu'on essaye d'être sur le même "train" les prochains jours pour s'éloigner du froid, c'est pas gagné. Côté warmshowers toujours rien, pas de réponse de Baja... ah ben de toute façon c'est trop tard on a traversé la ville ce matin, idem pour Novi Sad, idem pour le second contact de Belgrade. La loose, déception, ...
Du côté des trucs plus positifs, j'ai terminé "Sur le Route" de Kerouac et j'ai du mal à me faire un avis. La fin est un peu n'importe quoi : la fin du rouleau de papier ayant été mangée par le chien de l'auteur c'est le mec qui a fait la préface qui imagine ce qu'aurait pu être la réelle fin. Dans le genre un peu n'importe quoi... bon m'enfin on se fait une idée déjà bien détaillée du récit au travers des centaines de pages non dévorées et finalement c'est bien le chemin qui importe et non la destination. J'ai juste retenu une citation qui me plait beaucoup (et me parle) : "Ils avaient passé une journée à prendre des photos, il m'en a sorti d'autres. Je me suis rendu compte que ces clichés, nos enfants les regarderaient un jour avec admiration, en se figurant que leurs parents menaient des vies lisses et rangées, se levaient le matin pour arpenter fièrement les trottoirs de la vie sans se douter du délire, de la déglingue, de la déjante des réalités de notre existence, de notre nuit, de notre enfer, cauchemar absurde cette route-là."
Bon sinon si on résume c'est un mec qui passe sont temps à faire New-York -> San-Francisco pour la beauté du périple. Pas les paysages, non le chemin : les galères, les rencontres, les discussions, les moments avec des potes ou à espérer qu'ils soient à l'autre bout de la route... c'est le voyage en mode "pas une thune mais j'y arriverai". Avec des pauses qui durent parfois des mois pour travailler et gagner de quoi prendre un bus et se payer à manger pour faire 2000 km de plus et reprendre la route... et ainsi de suite.
Du coup comme j'était un peu sur ma faim malgré les kilomètres de papier électronique j'ai changé radicalement de style et ai attaqué un petit Marc Levy "Le voleur d'ombres". Celui-là n'a pas fait long feu puisque je l'ai terminé dans la journée :-) C'est très rafraichissant, le début style "Petit Nicolas" est très bon à lire, ça me donne envie de vous faire une journée "à la façon du Petit Nicolas" un de ces quatre, la suite est plus traditionnelle mais c'est une belle histoire, un bouquin de filles si je puis dire, j'ai bon espoir qu'Hélène le lise... c'est un peu un truc entre nous, il y a pas mal de bouquins qui je lui conseille, certains que j'aimerai vraiment qu'elle lise pour qu'on puisse en discuter ensuite, mais non, Hélène s'enfile régulièrement un bouquin par jour mais jamais un de ceux qui me tienne à cœur qu'elle lise... allez savoir pourquoi...